Messages : 590 Date d'inscription : 08/11/2012 Age : 40
Sujet: Mademoiselle Julie Mer 3 Sep - 21:33
Mademoiselle Julie Réalisé par Liv Ullmann Avec Jessica Chastain, Colin Farrell, Samantha Morton Sortie le 10 septembre 2014
Synopsis:
1890, Irlande. Tandis que tout le monde célèbre la nuit des feux de la Saint Jean, Mademoiselle Julie et John, le valet de son père, se charment, se jaugent et se manipulent sous les yeux de Kathleen, la cuisinière du baron, jeune fiancée de John. Ce dernier convoite depuis de nombreuses années la comtesse voyant en elle un moyen de monter dans l’échelle sociale.
Bande annonce VOST:
Cheshire Cat
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Sujet: Re: Mademoiselle Julie Mer 3 Sep - 23:07
Mon avis :
Ce film, adaptation d'une pièce d'August Strindberg, constitue le dernier film réalisé par Liv Ulmann, quatorze ans ans après sa précédente réalisation (Infidèle en 2000) ainsi que la concrétisation pour elle d'un rêve jamais accompli : jouer Mademoiselle Julie sur les planches.
N'ayant pas lu la pièce ni vu les précédentes adaptations cinématographiques ou télévisuelles, mon avis ne sera pas influencé par des éléments extérieurs au film.
Ne soyez pas rebutés par l'aspect long huit clos et théâtralisé du film (2h13 tout de même), si vous prenez le temps de le regarder et de réfléchir, vous y verrez une profondeur qui ne se voit pas forcément au premier abord. Simplement, attendez vous à quelque chose sombre et de complexe.
Nous sommes donc en Irlande en 1890. Lors de la nuit de la Saint Jean, Mademoiselle Julie se retrouve seule avec deux domestiques dans la propriété de son père le Baron : il y a John, le valet de son père, et Kathleen, la cuisinière et fiancée de John. Et chacun va, au cours de cette nuit, dévoiler ses espoirs, ambitions ainsi que sa nature profonde. Julie, qui a perdu sa mère très jeune, est jeune, belle, indépendante et bien éduquée. Elle semble faire absolument tout ce qu'elle veut, sans crainte du « qu'en dira-t-on ». Pourtant elle souffre d'un manque d'affection qui va la pousser vers John qui lui paraît séduisant, sûr de lui, comme en mesure de lui apporter la force de volonté et tout ce qui lui manque. John, issu d'une famille pauvre, est quelqu'un de profondément fier et marqué par ses diverses expériences passées (il méprise sa condition d'origine). Il fait preuve d'une ambition débordante et voit en Julie un moyen de s'extraire de sa condition de domestique et d'accéder à une autre condition sociale. Kathleen, elle, est la cuisinière du domaine et n'est d'ailleurs jamais sortie de sa région natale. D'une nature très pragmatique, sensible et dévouée, elle est très croyante et semble heureuse de sa condition dans la vie même si elle souhaiterait que John arrête de regarder les autres femmes (et surtout leur maîtresse). Elle va être la spectatrice des événements qui se joueront entre les deux autres protagonistes.
Il est question tout au long du film de volonté : qu'il s'agisse de volonté de liberté, d'aimer et être aimé, d'accession sociale, de trouver sa place dans la vie ou encore d'être heureux... mais justement, ces volontés vont entrer en conflit, de même que les personnages. Et, John, assoiffé de réussite va écraser les espoirs des deux femmes : Julie, en la privant d'un amour qu'elle pensait avoir trouvé, et Kathleen, en lui faisant réaliser que jamais il ne serait à elle ni ne se contenterait de ce qu'il a déjà. Il est difficile d'en dire plus sur les personnages sans en révéler trop sur l'histoire tellement ils sont complexes et profonds. Même si j'ai pu regretter un temps les longs dialogues, il est vrai qu'ils permettent vraiment d'entrapercevoir cet aspect des personnages et d'une certaine manière de ressentir ce qu'ils ont vécu ou vivent. Malheureusement, c'est ici que je vois le principal défaut du film car parfois, le jeu de Jessica Chastain et de Colin Farrell semble forcé avec des émotions qu'ils n'arrivent pas à nous faire ressentir, ce qui enlève un peu de profondeur aux personnages de Julie et John. J'ai eu l'impression à ces moments-là d'une certaine platitude et d'un manque d'émotions alors même que les paroles étaient très touchantes (preuve de fragilité, de violence contenue...) Mais cela reste ponctuel. Et je dois reconnaître avoir redécouvert Samantha Morton que j'ai trouvé admirable dans la peau de son personnage. Elle parvient à prendre de l'importance dans le film et dans l'histoire alors même que son personnage n'était que secondaire.
Concernant la réalisation, elle peut parfois paraître un peu lisse, mais elle demeure magnifique et poétique : que cela soit par les jeux de lumière, les éléments de la nature qui sont intégrés au décor... D'une certaine manière, j'y ai trouvé la sensibilité et la passion de la réalisatrice pour l’œuvre d'origine.
De même, la musique est extrêmement bien utilisée dans le film. Elle y est présente vraiment quant il faut et permet au spectateur de ressentir les non-dits et de prendre connaissance de toute la mesure dramatique du récit.
Un film tout en profondeur et sensibilité (ne vous fiez pas à la première impression de longueur!!) qui donne envie de découvrir l'œuvre d'origine.