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 Rencontre avec Sarah Dessen - Livre Paris - Mars 2018

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Karen
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Karen


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MessageSujet: Rencontre avec Sarah Dessen - Livre Paris - Mars 2018   Rencontre avec Sarah Dessen - Livre Paris - Mars 2018 Icon_minitime1Mer 16 Mai - 12:01

Interview de Sarah Dessen


Rencontre avec Sarah Dessen - Livre Paris - Mars 2018 Dsc08310

En marge de Livre Paris, nous avons eu la chance d'interviewer Sarah Dessen dont le nouveau roman, Once and for all, vient tout juste de sortir aux Editions Lumen.

Nous avons passé une demi-heure passionnante, avec davantage une discussion qu'un simple échanges de questions-réponses. En voici en partie la retranscription... Je vous ai épargné nos digressions personnelles sur nos lectures  wink


Vous écrivez des romans contemporains qui chacun se concentre sur un thème en particulier, souvent des thèmes d’actualité, des « morales » à insuffler aux lecteurs, même si souvent cela part du bon sens. Est-ce important pour vous ?

J’essaie en fait de ne pas trop penser au message car les adolescents sont les premiers à sentir que vous essayez de rentrer dans leur tête. Mais je pense que ce qui ressort c’est qu’il y a des hauts et des bas, le bon et le mauvais et j’essaye toujours de compenser les deux. Le message, je pense, qu’il y a toujours dans mes romans c’est un sentiment d’espoir, celui que tout se finira bien, même si vous ne finissez pas exactement là où vous pensiez mais plutôt là où vous êtes censé être. Je pense que c’est ce qui connecte toujours mes livres, c’est LE message à insuffler car je pense qu’en tant qu’adolescent on perd facilement espoir et on pense que le monde n’a pas vraiment de sens, qu’on ne trouve pas sa place. Alors oui le message général que je veux transmettre c’est de ne pas perdre espoir.

Et pour l’aspect contemporain de vos romans ? Il faut avouer que cela sort un peu des sentiers battus aujourd’hui où la mode se tourne vers les romans de fantasy et paranormaux.

Je pense que serait nulle en fantasy. Je n’en lis que très peu même si ma fille qui a 10 ans est fan de ce genre. J’ai toujours été attirée par les histoires de véritables personnes, dans des véritables endroits. Je pense que c’est aussi par paresse car dans la fantasy on doit construire tout un monde, on doit l’inventer et l’expliquer avant de pouvoir écrire son histoire. Dans le contemporain, tout le monde connait déjà tout. La fantasy c’est comme de la poésie : pour l’écrire on doit vraiment être bon. Tout le monde rirait si j’écrivais de la fantasy. J’ai toujours été attirée en tant que lectrice par le contemporain, donc en tant qu’écrivain, j’écris ce que je voudrais lire. Mais je suis vraiment impressionnée par les auteurs de fantasy qui réussissent à créer tout cela. Comme je l’ai dit ma fille est une fan. Comme elle n’a que dix ans elle a toute la vie devant elle pour découvrir de nouveau univers et je suis vraiment excitée pour elle.

je suis contente que vous écriviez de la romance contemporaine YA car il y en a de moins en moins.

Oui je suis d’accord. Quand j’ai commencée à être publiée en 1996, il y avait très peu de YA. Maintenant on peut voir des énormes rayons de paranormal, les gens se sont mis à la fantasy. Je pense que c’est cyclique : quand Harry Potter est sorti cela a créé une vague dans le genre, de même pour Twilight. Alors que lorsque Nos Étoiles Contraires est sorti il n’y a pas eu cette vague, ou du moins pas de cette ampleur, car sans doute que cela vend moins de rêve.

Et dans le YA contemporain actuel il a plein de nouvelles thématiques engagées avec des romans sur les personnes LGBT, les afro américains… Et ce sont de véritables succès internationaux !

Oui lorsque j’ai commencé il n’y avait pas de LGBT dans le YA. Maintenant plus de voix peuvent être entendues à travers le YA, aussi bien les personnages que les auteurs. Et j’espère que cela va continuer comme cela. Il n’y a qu’à voir le succès de Love, Simon ou des auteurs comme Adam Silvera ou Angie Thomas…

Ce qui me frappe dans vos romans c’est que les personnages sont vraiment ordinaires, ils ne sont pas tous très beaux, pas parfaits, on peut vraiment s’identifier à eux : est-ce important pour vous ?

Oui je pense. J’essaie de me diversifier dans mon matériel d’écriture : je n’avais pas assez d’ethnicités différentes, donc je me suis dit qu’il fallait changer ça pour que plus de gens puissent se retrouver dans mes romans. C’est pour cela que je me suis attaquée aux problèmes universels comme les problèmes des ados avec leurs parents, leurs amis. On se reconnait pas facilement dans des supermodèles ou des gens terriblement riches mais on peut se reconnaître dans un jeune qui essaye simplement de traverser le lycée sans anicroches, qui ne s’entend pas avec sa mère ou bien qui est amoureux d’une personne qui ne sait même pas que vous existez ou encore qui ont des problèmes avec leurs amis, ce genre de choses. Les livres qui résonnent en moi sont ceux auxquels je peux m’identifier.

Est-ce que vous lisez vous-même du YA contemporain car beaucoup d’auteurs se refusent à lire des romans du même genre que ce qu’ils écrivent afin d’éviter le plagiat.

Je ne lis pas énormément de YA. Lorsque je me suis lancée dedans il n’y en avait pas beaucoup et lorsque j’écris, je ne lis pas ou très peu de YA, je lis surtout de la romance contemporaine ou de la fiction car je ne veux pas être influencée. Quand j’écrivais Écoute-Là, je savais que le livre Laurie Halse Anderson « Vous Parler De Ça », contenait une histoire d’agression sexuelle alors je ne voulais pas le lire tant que je n’avais pas terminé d’écrire le mien. Je lis les histoires de mes amis lorsqu’ils sortent, peu importe le genre, ou lorsque l’on me demande de lire un roman.
Une ancienne babysitter de mes enfants est maintenant professeurs dans une école assez pauvre et la bibliothèque de leur CDI n’est pas très remplie alors je lui donne énormément de livres. Elle est toujours contente car ses élèves peuvent lire de nouveaux livres qui ne sont même pas encore sortis donc ils sont très excités ! Ils ont tellement peu l’habitude d’aller à la bibliothèque qu’ils ne savent pas comment choisir un livre donc ils lui demandent souvent conseil. J’ai été élevée en allant à la bibliothèque ou à la librairie tous les week-ends, mais je comprends que pour quelqu’un qui n’en a pas l’habitude la lecture puisse être effrayante. Quand ma fille était petite et que l’on se trouvait dans une bibliothèque elle m’approchait parfois avec un roman et me demandais de le lui lire, alors je m’asseyais et lui faisait. Les enfants qui étaient là se trouvaient attirés par quelqu’un qui lisait. Les adolescents sont pareils : le moment préféré de la classe de ma fille, c’est lorsque leur professeur leur lit quelque chose. Une des meilleures manières de donner envie à quelqu’un de lire, est de leur lire quelque chose.

Once and For All parle  d’une organisatrice de mariage et d’une fusillade dans une école : Un thème plus que d’actualité quand on voit ce qui se passe aux Etats Unis et la marche à Washington prévue la semaine prochaine !

Oui, je voulais que ma narratrice souffre, qu’elle subisse cette perte, je savais que son premier amour allait mourir. Je cherchais comment, j’ai pensé à un accident de voiture car je voulais absolument que ce soit un accident et non un suicide. Et les fusillades sont partout maintenant, alors qu’à mon époque, quand j’étais au lycée il n’y en avait pas. J’y pense souvent, car en tant que parent avec une fille dans une école publique cela m’inquiète. Elle n’a beau avoir que 10 ans, son école fait des exercices pour les préparer en se cachant sous les bureaux, ce genre de choses. C’est vraiment effrayant. Les adolescents vivent avec cette épée de Damoclès, avec laquelle nous ne vivions pas à leur âge donc c’est important d’en parler. Et les voix des jeunes sont inspirantes, surtout depuis la fusillade en Floride. A présent les jeunes commencent à parler ouvertement et à protester. À Washington, il y aura un grand rassemblement ce samedi. Ces jeunes m’inspirent vraiment, ils peuvent changer le monde je pense, nous en avons besoin.  Leur voix est bien plus puissante, ils sont en colère, ils ne se sentent pas protégés, ils ont l’impression que le gouvernement ne s’intéresse qu’à contenter le gun lobby plutôt que de les protéger. Ils ne devraient pas avoir à s’inquiéter de cela au lycée, ils ont déjà tant à gérer à cette âge, sans rajouter la possibilité de telles horreurs. C’est pourquoi lorsque j’ai écrit ce roman, j’ai divisé cette partie car cela aurait été trop dur d’un coup. J’ai compensé les mauvaises nouvelles avec de bonnes nouvelles. J’aime que les gens ressortent avec de l’espoir en finissant mon livre. Il y a 15 ans quelqu’un dans ma maison d’édition m’a dit « je suis heureuse d’avoir ton livre dans ma liste car tous les autres sont tellement déprimants !».

C’est aussi pour cela que j’adore vos livres car il y a toujours du bon : la vie est assez difficile d’elle-même sans se rajouter des livres sans cesse déprimants…

Je suis d’accord j’aime les messages optimistes et les fins heureuses. Si je lis un livre qui finit mal, cela me brise le cœur, je suis déprimée et j’ai déjà les infos pour ça alors non merci.

Dans tous vos romans, on retrouve aussi toujours des amitiés très fortes : est-ce important pour vous ?

Oh oui ! Mes amis m’ont vraiment aidé lorsque j’étais au lycée, nous étions 6 et nous nous sommes trouvées dès la première année de lycée ! Et nous sommes toujours aussi proches même si l’on ne peut pas se voir aussi souvent. Je suis très proche de ma mère depuis toujours mais j’ai eu un moment où le besoin de m’éloigner s’est fait sentir et mes amies se sont occupées de moi, nous avons grandis ensemble. Même si elles sont toujours aussi importantes aujourd’hui ce n’est pas pareil. Adolescente ou mourrait pour nos amis ! Tout est plus intense, c’est là où l’on vit les choses les plus stressantes et les personnes avec qui on partage ces moment-là restent à jamais dans notre cœur. C’est pour ça qu’il y a toujours de belles amitiés dans mes livres.

Quelles sont vos prochains projets ?

J’avais commencé un nouveau roman mais ça n’a pas fonctionné, ça arrive, j’adorais l’idée, en théorie c’était bien mais dès que j’ai commencé à l’écrire rien ne fonctionnait. Quand j’étais en terminale j’avais un petit ami dont j’étais folle amoureuse, c’était vraiment sérieux entre nous et il a rompu avec moi au début de l’année de terminale et ça a changé tous mes plans. Donc mon idée c’était d’écrire à propos d’une jeune fille qui avait organisé toute sa vie autour de son petit copain et il rompt avec elle au début de son année de terminale. Elle ne passe donc pas son année comme elle l’avait prévu mais au final elle est meilleure de pleins de manières différentes, et surtout, elle réalise que l’on ne peut pas construire son avenir sur une autre personne que soi. Donc en théorie c’était bien mais en commençant à l’écrire je me suis rendue compte que lorsque la rupture se produit à la page deux, cela devient vite ennuyeux et déprimant. Si elle se plaint de la rupture pendant 50 pages on va vite la détester et cela ne me donnait vraiment pas envie de le lire, et pourtant je suis l’auteur ! Je l’ai donc mis de côté ce qui est un peu stressant. Et c’était juste avant ma venue à Paris, donc là je suis un peu en mode « qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire ? ». Et ce voyage était vraiment une bonne chose pour me changer les idées. Surtout qu’après treize publications, je m’inquiète de ne pas parvenir à me renouveler. Je préfère donc attendre de trouver une idée innovante, même si ça veut dire que je n’ai pas de livre dans mon planning immédiat. Conclusion : venir à Paris c’est juste génial parce qu’à la maison je serais en train de me lamenter, en mode « oh mon dieu je n’ai rien à écrire » alors qu’ici je peux juste demander un autre croissant !  Ça va être un très dur retour à la réalité lorsque je n’aurais plus mon pain au chocolat matinal (rires)

Un de vos livres a été adapté au cinéma avec Mandy Moore, How To Deal.  une autre adaptation prévue ?

J’adorerais ! Mais je ne pense pas que cela se reproduira. C’était il y a longtemps. C’était génial et j’ai vraiment eu la chance qu’un producteur aime vraiment les livres et porte le projet. Une productrice envisage actuellement d’adapter mon livre Say Anything, on verra ce que ça donne. Surtout que maintenant, avec Netflix, les adaptations cinématographiques sont plus compliquées puisque les gens préfèrent les séries.  Si l’on adapte un livre, cela permet d’avoir plus de temps et plus de détails. Mon agent essaye du coup d’aller vers Netflix pour avoir quelque chose de la trempe de 13 Raisons. Mais quelqu’un doit être intéressée et je ne vais pas aller me vendre. Mais j’ai un super agent qui s’en occupe, je lui fais confiance, donc qui sait ! Et puis, j’ai déjà eu un film donc je ne vais pas être avide au point d’en demander un deuxième ! Et j’ai eu la chance incroyable de rencontrer Mandy Moore et je l’adore !

Rencontre avec Sarah Dessen - Livre Paris - Mars 2018 69aa3010

Si vous deviez vous remarier demain, quel serait votre mariage de rêve ?

Je pense que ça serait un petit mariage et je ne prendrais pas trop de temps à le planifier. J’ai pris un an pour programmer mon mariage, ce qui signifie que j’ai perdu un an de ma vie à me prendre la tête pour des choses qui maintenant me semble insignifiantes. Je pense que je me marierais sur la plage avec un bon verre de vin et quelques amis et ce serait tout. Pour nos dix ans de mariage, nos amis nous ont en quelque sorte re-mariés, notre fille avait deux ans, c’était vraiment génial. Nos amis étaient tous là, on avait des fleurs, c’était parfait, vraiment. Mais je garde de bons souvenirs de mon mariage, j’étais plus jeune donc je voulais les choses en grand. Et après la première fois on devient blasé.

Et vous savez l’histoire que je vous racontais à propos du petit copain qui m’a larguée en terminale ? Et bien c’était mon mari ! Après nous nous sommes remis ensemble et depuis nous ne nous sommes plus quittés. Mais parfois j’aime le lui rappeler, par exemple tranquillement assis sur le canapé je lui dis « je n’arrive toujours pas à croire que tu m’as larguée !» et il me répond « c’était il y a 30 ans !!! Je suis désolé, je suis revenu et on a une fille ensemble ! Pourquoi je paye encore pour une décision que j’ai prise à 18 ans ? ». Mais je ne pourrais jamais oublier qu’il m’a largué et soit sortie avec une autre. J’étais vraiment blessée mais il faut voir le bon côté des choses : cela m’a donné pleins d’idées d’écriture. Ce qui me frappe quand je rencontre d’autres auteurs c’est à quel point ils détestent leurs années lycée. Je pense que si tout le monde aimait les leurs personne n’écrirait à ce sujet. Heureusement donc que nous sommes tous passés par la case lycée…

Merci beaucoup pour cette interview et ce très bon moment passé en votre compagnie !

Et merci aux éditions Lumen pour avoir organisé tout cela !


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