BROOK Meljean - THE IRON SEAS - Tome 1 : Le duc de Fer

Le duc de Fer
Meljean Brook

Sortie le 3 octobre 2012

Il a libéré l'Angleterre du joug de la Horde. Pour tous, il est le duc de Fer, héros craint et adulé. Pourtant, quand un homme assassiné est retrouvé chez lui, Rhys Trahaerne comprend que certains ne le craignent pas. A commencer par Mina Wentworth, chargée de l'enquête. Séduisante, mystérieuse... et très douée. La posséder devient bientôt l'unique quête de Rhys, alors qu'une conspiration menance l'Angleterre.

Les éditions J’ai Lu nous embarquent ce mois-ci avec le duc de Fer dans un univers complètement original, une romance paranormale qui fait le pari risqué de mélanger plusieurs genres – Steampunk, SF, pirate, policier-, et le moins qu’on puisse dire c’est que c’est réussi !

Le monde créé par Meljean Brook est très complexe, d’autant plus complexe qu’elle s’est refusée à prendre le temps au début du roman de nous le présenter. On ne le découvre qu’au compte-goutte, au détour de conversations, de réflexions ou de descriptions et il nous faut du temps avant de comprendre vraiment ce qu’il en est.
Nous sommes complètement dans un récit de science-fiction dans le sens où il ne se déroule absolument pas dans le monde tel qu’on le connaît. Je le situerais, vu les modes et les descriptions de Londres, dans un XIXe-début XXe siècle complètement fictif. Deux cent ans plus tôt, toute l’Europe avait été conquise par les Mongols, une Horde venue de l’Est, et ils ont trouvé un moyen radical de contrôler la population : leur implanter des nanoagents, des millions de machines microscopiques dans le corps. Ces nanoagents leur garantissent une guérison rapide et surtout le fait de pouvoir greffer sur le corps tout objet mécanique en cas de blessures graves. Pour s’assurer leur reproduction, la Horde programmait épisodiquement des phases de Frénésie au cours desquelles les « bogués », ainsi qu’on les appelle, étaient pris de désir frénétique et copulaient avec toute personne à proximité. Seulement, le duc de Fer, un célèbre pirate, réussit à renverser la Horde permettant ainsi aux bogués de retrouver un semblant de liberté et aux expats (ceux qui avaient fui) de revenir dans l’Ancien Monde.
Nous sommes à Londres, neuf ans plus tard. Mina Wentworth fait partie de l’aristocratie anglaise qui a pâti de la présence de la Horde. Sa mère a été violée trente ans plus tôt lors d’une Frénésie et neuf mois plus tard Mina était née avec les traits mongols (les yeux bridés) rappelant à tout le monde son infamie. Mina et sa famille sont méprisées et pour assurer leur survie, la jeune femme s’est mise à travailler et est devenue inspectrice. Quand un cadavre est retrouvé dans la propriété du duc de Fer c’est à elle que l’on fait appel. Elle découvre un homme fier et mystérieux sur qui elle devra apprendre à compter pour résoudre une affaire qui pourrait bien menacer la survie de son pays…

C’est d'un véritable récit d’aventures qu’il s’agit et l’auteur enchaine les actions sans laisser aucun répit au lecteur. L’univers qu’elle a créé est tellement maîtrisé que les descriptions sont parfaitement insérées à l’intrigue, sans délimitation, apportant encore plus de réalisme. Nos sens sont frappés de plein fouet par la profusion d’automates, de personnes greffées, d’aéronefs, de vaisseaux, voire même de zombies. Et comme si cela ne suffisait pas, elle nous fait voyager de l’Angleterre aux côtes de l’Afrique en passant par la France. Après l’atmosphère complètement steampunk victorien du début du roman on plonge dans un récit de pirates, et on a même droit à des créatures fantastiques du style de ceux de 20 000 lieues sous les mers (petit clin d’œil à la broche du personnage sur la couverture que je trouve d’ailleurs sublime, parfaitement en adéquation avec le roman). On n'a pas le temps de souffler et on adore !

Les personnages sont tout aussi soignés et on ne peut que tomber sous le charme du couple principal, Mina et Rhys. Ils ont tous les deux des passés difficiles qui ont laissé des séquelles et les ont rendus méfiants. Pour Mina notamment, tout désir sexuel est lié dans son esprit aux Frénésies et il lui est donc très difficile de lâcher prise. En plus de résoudre l’affaire de meurtre et le complot qu’ils découvrent derrière, ils devront donc apprendre à se faire confiance et guérir les blessures du passé. C’est très beau et parfaitement conté.
Les personnages secondaires sont tout aussi soignés et j’ai été particulièrement emballée par Scarsdale, le meilleur ami du duc de Fer, le Forgeron maître en automates et greffes, ou encore Yasmeen, la lady Corsaire qui commande son propre aéronef et qui en remonte à tous les hommes. Ça tombe bien, elle sera justement l’héroïne du prochain tome avec un homme que l’on rencontre aussi ici…

Une très belle surprise que ce roman brillant et original !

J'ai envie de m'en coller une pour oser trouver du négatif dans ce livre lol Mais je me devais d'être honnête sur mon ressenti. Quoiqu'il en soit, lisez !!!!!

Mon avis pour Place To Be :

Ce livre avait tout pour être un coup de cœur d’exception qui aurait pu transcender le genre de la romance mais hélas, j’ai rencontré quelques turbulences en fin de vol qui m’ont contrainte à descendre de mon petit nuage. Ceci étant, cela ne m’empêche pas de vous le recommander plus que chaudement, car l’univers steampunk et le cadre historique personnalisé valent assurément le détour. Et ne mentons pas, les trois quarts de ce tome sont d’une qualité hallucinante, le dernier quart restant tout de même très bon. Sans parler du contexte uchronique, on frise, en effet, la perfection grâce à l’action, au minutieux travail d’enquête, au personnage de Mina et à l’exploitation du désir provoqué et subi par le Duc de Fer, j’ai nommé le séduisant Rhys Trahaearn.

Ce qui m’a déplu tient à peu de choses puisque cela concerne principalement le fait qu’on a de prime abord affaire à une uchronie fabuleuse, sur fond de piraterie, saupoudrée d’une romance prometteuse, dont on espère qu’elle se mettra en place de manière progressive et crédible. Ce qui est le cas. La tension sexuelle instaurée au début est saisissante, d’autant que Mina oppose une farouche résistance aux avances du Duc, qu’elle n’hésite pas à éconduire avec poigne à de multiples reprises. Malheureusement, quand les choses se concrétisent entre nos deux héros, l’histoire tombe dans les clichés de la romance. Les non-dits/quiproquos se multiplient face à des évidences qui crèvent les yeux. Ce qui est surprenant quand on sait que la reddition sexuelle de Mina est avant tout une marque de confiance qui aurait dû envoyer un message clair au Duc. Du coup, ce ne sont plus les obstacles politiques ou les traumatismes personnels qui freinent leur amour, mais la non déclaration des sentiments, de laquelle on pensait pouvoir se passer. Le lecteur aurait dû rester dans le flou sur certains points, un peu avant la fin, et pour cela, il aurait suffi de se focaliser plus sur Mina. Concernant les scènes de sexe en elles-mêmes, on y va franco pour le plaisir du lecteur, elles traduisent bien la complexité de la relation Rhys/Mina.

Malgré ce petit accroc, mon impression est plus que positive (note : 4/5). Et pour de la romance –puisque c’est de cela qu’il s’agit–, c’est du lourd qu’on tient dans nos petites mains. C’est d’ailleurs, dans le genre (et pas que dans celui-ci), le livre le plus dense que j’ai pu lire.
Nous nous retrouvons dans un Londres aux mœurs victoriennes, du moins en ce qui concerne l’aristocratie. Le pays a longtemps été sous le joug de la Horde, un groupe d’envahisseurs mongoles qui ont asservi les peuples d’Europe, en en faisant des pantins, pour mieux leur voler leurs ressources. Depuis presque une décennie, la population libérée tente de retrouver une vie normale, ce qui est difficile quand 80% de la population a été contaminé par des virus nanotechnologiques qui altèrent les organismes pour mieux les renforcer.

Sous un ciel brumeux, envahi par des aéronefs, dans un décor industriel et mécanique, nous suivons Mina, une paria de naissance dont le physique atypique la contraint à subir la haine de ses compatriotes. C’est une femme indépendante, qui exerce le métier d’inspecteur de police. Elle dispose de la force et de l’humour d’une héroïne de bit lit ! Pour une fois, ce n’est pas de l’homme dont je suis tombée amoureuse ^^ En enquêtant sur un meurtre, elle rencontre le célèbre Duc de Fer, par lequel elle ne se laissera pas impressionner malgré sa présence écrasante et l’attirance qu’il exerce sur elle.
Tous les personnages, qu’ils soient principaux ou secondaires, se voient dotés d’un véritable passé, de blessures mal cicatrisées, et ça colle tellement bien avec l’univers de répression et d’horreur, dans lequel ils évoluent, qu’on fait une belle révérence à l’auteure.
On voyage beaucoup dans ce tome, visitant les continents à bord d’aéronefs ou de bateaux aux accents steampunks. On affronte des zombies, des krakens (20 000 lieues sous les mers!), des pirates sans foi ni loi et jusqu’au dénouement, les coupables restent dans l’ombre, nous faisant tantôt accuser un camp tantôt un autre. Ce qui est fichtrement plausible compte tenu du fait que l’attaque peut venir de partout, le monde étant bouleversé et instable, ce qui est retranscrit avec habileté.

Voici donc un très bon roman, à l’écriture efficace, qui m’a fait miroiter la perfection, mais qui ne l’a pas atteinte à cause du fait qu’après tant d’épreuves traversées par nos deux héros, on tombe dans le travers du je t’aime non explicité, mais évident, qui fait capoter la relation avant rabibochage prévisible. Et à la fois, on le voulait ce happy-end. Vivement la suite, rien que pour le plaisir de retrouver cet univers à la densité époustouflante, qui véhicule un joli message de tolérance.