Wonder
R.J. Palacio
Pocket Jeunesse
Sortie le 3 janvier 2013
Quatrième de couverture :
"Je m'appelle August. Je ne me décrirai pas. Quoi que vous imaginiez, c'est sans doute pire."
Né avec une malformation faciale, Auggie n'est jamais allé à l'école. A présent, pour la première fois, il va être envoyé dans un vrai collège... Pourra-t-il convaincre les élèves qu'il est comme eux, malgré tout ?
Ne jugez pas
un livre garçon
à sa couverture son apparence
Avis de Karen :Wonder est un récit poignant, sublime et d’une incroyable intensité émotionnelle. A lire absolument !
August, surnommé Auggie par sa famille, est un jeune garçon de 10 ans atteint d’un cas rarissime de dysplasie oto-mandibulaire bilatérale aggravé par une microsomie hémicrâniofaciale ou dysplasie oculo-auriculo-vertebrale. Un nom scientifique à rallonge aux sonorités savantes pour désigner l’indescriptible : son visage est horriblement déformé. Et, comme le dit August, dites-vous que « quoi que vous imaginiez. C’est sans doute pire. » August, qui commence le récit, ne se décrit donc pas. Pourquoi le ferait-il alors que la seule chose qu’il veut oublier et qu’il ne peut pas c’est à quoi il ressemble ? Nous n’avons donc que des descriptions par bouts, par détails, aux détours d’une phrase ou d’une pensée. Et pourtant ça suffit à chaque fois pour nous briser le cœur. Jusqu’au choc de la page 120 où l’on découvre, par l’intermédiaire d’un tiers, une description entière d’August, dans sa réalité la plus crue. On ne peut s’empêcher de penser avec une immense culpabilité : « Oh mon Dieu ! Je ne pensais pas que c’était si monstrueux ! » Pour autant, cela reste profondément humain et décent et on sent bien que le but de l’auteure n’est absolument pas d’interpeller, de créer une fascination morbide, ou de tabler avec facilité sur de « la pornographie de l’horreur ». Loin de là !
Et pourtant, il a déjà subi 27 opérations depuis sa naissance, opérations qui l’ont contraint à un incessant va-et-vient entre l’hôpital et la maison et de rester alité la plupart du temps. Il a donc été instruit à la maison par sa mère. Mais cette année, August rentre en 6e et après mûre réflexion, ses parents ont décidé de l’inscrire dans un petit collège privé pas très loin de chez eux. Pour August, c’est le drame. Depuis sa naissance, toutes les personnes qui aperçoivent son visage sont horrifiées, choquées, effrayées ou dégoutées. Et les autres enfants sont sans doute les pires car ils n’ont pas encore conscience de la portée de leurs mots et de leurs réactions et certains se montrent cruels comme seuls des enfants peuvent l’être. Alors subir ça quotidiennement au milieu de centaines d’enfants ? Pas question ! Mais ses parents refusent de transiger et après avoir rencontré le principal du collège et quelques enfants sélectionnés pour lui faire visiter les locaux, August finit par accepter. Il fera donc cette année sa rentrée en classe de 6e…
Le roman est narré à la première personne par plusieurs protagonnistes, tout en restant chronologique dans la continuité du récit (cette fameuse année de 6e). August commence bien évidemment et reprendra la parole à la fin. Il nous parle avec ses mots d’enfants, son langage parlé. Et si au début c’est quelque peu déstabilisant, on oublie bien vite le style pour s’attacher au poids des mots et aux émotions qu’elles font naître en nous. On écoute aussi Via, sans grande sœur de 14 ans, Summer et Jack, dont l’amitié a été loin d’être évidente, Justin, le petit ami de Via et enfin Miranda, une amie de Via qui connaît August depuis sa naissance et qui en est profondément attaché. Tous ne se connaissent pas mais ont en commun le jeune garçon qui, d’une manière ou d’une autre bouleverse leur existence. Tous gravitent autour d’August qui, à cause de son apparence, attire sur lui toutes les attentions, bonnes ou mauvaises. Ce sont des tranches de vie qui offrent chacun une vraie leçon d’humanité.
Car c’est ce qu’est véritablement ce roman sublime : une leçon d’humanité, une claque magistrale. Ce livre est un formidable plaidoyer au service d’idéaux tels que la gentillesse, l’amitié, l’acceptation des différences et l’amour familial. Ils sont mis au premier plan sans jamais tomber dans le misérabilisme et le mélodramatique. En fait, on oscille sans cesse entre les rires et les larmes, même si ces dernières viennent bien trop souvent. Et pour alléger le tout, tout un panel de référence cuturelles et musicales nous sont offertes, sur lesquelles l’auteure revient d’ailleurs dans son blog (
http://rjpalacio.com/annotations.html). J’ai tout adoré : les émotions diverses et parfois contradictoires qui nous traversent, les fameux préceptes de M. Browne, le prof de lettres d’August, la relation exceptionnelle qui unit les 4 membres de cette famille, les réflexions des autres personnages sur August et finalement sur eux-mêmes… Car au final c’est de ça qu’il s’agit : se connaître soi-même grâce à la manière dont on réagit face à un évènement –ou ici un être- exceptionnel. Et August ne s’y trompe pas lorsqu’il affirme qu’il n’est qu’un garçon ordinaire à l’intérieur. Ce ne sont que les autres qui le rendent exceptionnel parce qu'ils se sentent exceptionnels en sa présence…
En finissant le livre, on a juste envie d’une chose : faire nôtre ces mots de Saint Exupéry :
« On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux. »
Wonder est un bijou de la littérature jeunesse ! Pour ma part c'est un énorme coup de coeur !