ROZENFELD Carina - Les Sentinelles du Futur

Les Sentinelles du Futur
Carina Rozenfeld

Syros - Soon
Sortie le 5 septembre 2013

2359. La Terre est à l’agonie. Les erreurs passées de l’humanité l’ont menée au seuil de sa propre disparition. Pourtant, à New York, les Sentinelles du Futur, une poignée de femmes et d’hommes habilités aux voyages temporels, l’ont promis : l’avenir est radieux, il faut y croire, ils l’ont vu de leurs propres yeux. Mais cet Espoir auquel s’accroche l’humanité est brutalement anéanti quand les Sentinelles du Futur reviennent d’une de leurs missions avec ce terrible message : dans trois cents ans, des extraterrestres attaquent la Terre, une Terre sans défense car pacifiée. Le Passé pourra-t-il alors sauver le Futur ?

La Terre, an 2343. Le professeur Lindam, astrophysicien spécialisé dans l’étude des trous noirs, découvre par hasard un vortex menant vers le futur, plus précisément 300 ans plus tard. Pour l’explorer, furent créées des Sentinelles du futur, des hommes et des femmes chargés de traverser le vortex et d’explorer le monde futur. Ce qu’ils découvrirent modifia à jamais leur perception des choses. Alors que la Terre telle qu’ils la connaissent n’est que désolation, grisaille, pluies acides et pénuries en tous genres, le futur montre une Terre resplendissante de verdure, dans laquelle tous les hommes vivent en paix. Mieux encore, ils découvrirent qu’en 2360, un miracle devrait se produire : ils mettraient au point des « Sphères Blanches », des sources d’énergie autoalimentées et stables, aptes à faire revivre toute vie sur Terre, à nettoyer l’atmosphère et reconstruire la couche d’Ozone. C’est ainsi que L’Espoir est né, le mythe des « Sphères Blanches » créant l’espoir d’un avenir moins sombre pour la Terre et pour les individus. Et peu importe que personne ne sache comment ce phénomène se déroulera, l’Espoir est là et cela suffit pour l’humanité : « l’Espoir c’est ce qui se rapproche le plus d’un avenir meilleur ».
Nous sommes désormais en 2359. Elon, 16 ans, est élève à l’Académie de New York, là où les Sentinelles du Futur sont formées, là où l’Espoir est né. Orphelin de mère, il vit assez pauvrement à Paris avec son père et ne doit sa place à l’Académie qu’à ses extraordinaires capacités. Il peut en effet prévoir les catastrophes quelques minutes avant qu’elles ne se produisent, et c’est en prenant la mesure de son don et de ce qu’il peut apporter à l’humanité, qu’une bourse lui a été accordée. A chaque fin de week end, il empreinte donc le tunnel sub-Atlantique pour se rendre à l’Académie où il suit une formation de pilote ainsi que des cours d’histoire du futur nés de toutes les observations des Sentinelles. Et il passe son temps libre avec ses meilleurs amis, Gérème, passionné de botanique, et Micko, la petite-amie de Gérème, pilote comme lui.
Mais voilà qu’un drame survient et remet en cause tout espoir. Certaines Sentinelles du futur reviennent avec des images d’horreur : la Terre du futur est attaquée par des extraterrestres et de nombreuses morts et destructions ont déjà eut lieu. L’Etat-major décide alors d’envoyer de l’aide aux populations futures, aide dont Elon fait partie. Une fois là-bas, il fait la connaissance de Nuts, une jeune fille que les attaques ont rendue orpheline et qui, comme lui, est dotée d’un don…

Carina Rozenfeld nous montre encore une fois à quel point son imagination est débordante d’idées géniales en tous genres. Aucun de ses ouvrages ne se ressemblent (et il commence à y en avoir un certain nombre !) et les Sentinelles du Futur n’y font pas exception. C’est un monde futuriste, SF,  complètement original, dans lequel on est embarqué dès les premières pages. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le vol n’est pas de tout repos. Elle multiplie les actions, les rebondissements et les révélations, tout en y insérant la dose d’émotions nécessaires pour créer une incroyable empathie avec les personnages et l’intrigue. Je l’ai dévoré et j’ai adoré ! Plus encore que Phénix ! J’ai adoré l’idée, la manière dont c’est développé, le twist que l’on ne voit pas du tout venir, et par-dessus tout les personnages d’Elon et Nuts qui m’ont touché dès leur apparition. J’ai adoré la manière dont les choses sont amenées, que ce soit les explications sur le présent, le futur, et plus encore la relation entre les personnages. Entre Elon et Nuts c’est comme une évidence. Nul besoin de déclarations grandiloquentes, de prises de tête sans fin parce que plus c’est compliqué mieux ce serait. Ils sont là l’un pour l’autre, ils s’aiment, ils vont rester ensemble, et ils le savent tout simplement parce que c’est évident. Ils n’ont même pas besoin de l’exprimer par la parole.

Le roman est découpé en deux parties : la première dans le présent, la seconde dans le futur. La plupart du temps on suit le récit du point de vue d’Elon, mais parfois, il est interrompu pour nous livrer des extraits de l’UP de Nuts, des sortes de tablettes tactiles que chaque individu possède. Grâce à eux, on prend la mesure de l’attaque extraterrestre et on apprend à connaître Nuts. Ses passages sont complètement différents du reste du récit, plus poétiques et davantage gorgés de sentiments et d’émotions, ceux d’une jeune fille qui vient de perdre sa famille mais qui retrouve l’amour et l’espoir.

La problématique écologique est extrêmement présente dans l’histoire. Si les hommes du XXIVe siècle vivent aussi mal c’est à cause de leurs ancêtres (nous) qui ont détruit la planète en la surexploitant et en ne prenant pas en compte les différents signaux d’alerte qu’elle lançait. Mais le message n’est pas pour autant moralisateur (je déteste ce genre), il est juste intégré dans le récit avec des mots justes et forts, un élément primordial de l’intrigue. Elément que l’on retrouve encore, mais abordé différemment quand on pénètre dans le futur. Là, de nombreuses scènes m’ont fait penser à Avatar de James Cameron, la symbiose avec la nature et cette idée que cette dernière est vivante. Des scènes de toute beauté et particulièrement visuelles, qui ne peuvent que nous toucher, que la préservation de l’environnement nous importe ou pas.

Mais ce n’est pas le seul message que nous transmet ce roman. Il nous parle aussi de la haine, de la vengeance, et finalement du pardon, même pour ce qui paraît être impardonnable. Une belle leçon d’humanité qui nous est donnée, toute en finesse et avec une grande simplicité, et qui nous paraît du coup encore une fois, comme une évidence. Et cette manière de faire sonne de façon incroyablement juste.

C’est enfin un roman minutieusement documenté et je suis contente d’y avoir appris plein de choses, en plus de m’être fait plaisir. C’est ainsi que j’ai découvert qu’il existait en Norvège, sur l’île de Spitzberg, une chambre forte souterraine destinée à conserver dans un lieu sécurisé des graines de toutes les plantes de la planète et ainsi préserver la diversité génétique de la Terre. J’ai découvert également entre autres le sens du mot « ptéridologues » qui désigne des spécialistes des fougères...

Enfin bref, cela donne un roman génial que j’ai plus qu’adoré, un vrai coup de cœur. Et peu importe au final que l’on aime ou pas la SF, les thèmes abordés sont universels et l’intrigue et les personnages si bien construits que tout le monde y trouvera son compte. Un vrai régal !

Un dernier mot sur la couverture qui prend vraiment tout son sens une fois que le roman est lu et qui est vraiment superbe !