Mon avis On connaissait déjà l’immense talent de l’écrivain mais avec
Muse, Joseph O’Connor signe l’un de ses romans les plus forts, un vrai petit bijou.
Muse, c’est une histoire d’amour fulgurante qui prend la forme d’une ballade irlandaise, d’une promenade au fil des souvenirs de Molly Allgood où l’on croise John Millington Synge, Yeats, Lady Gregory… dans le Dublin de 1900. Tragique, poignant et empli d’une douce mélancolie, un roman rare comme on aimerait en lire plus !
Londres, 1952. A 65 ans, Molly Allgood alias Maire O’Neill n’est plus que l’ombre de la femme qu’elle a été. Cela fait bien longtemps qu’on ne lui offre plus de rôles, sa famille l’a oubliée, elle est pauvre et ne trouve de soulagement à sa lente déchéance qu’à travers l’alcool qu’elle ingurgite pour mieux oublier celle qu’elle est devenue. Mais Molly se souvient et nous entraine le temps d’une journée dans la vie trépidante qu’elle a connu, sur les traces d’un amour fou, bref et sincère.
Dublin, 1907, Molly a 19 ans, elle est magnifique, pleine de fougue et catholique lorsqu’elle rencontre le dramaturge scandaleux Synge. Il a dix-huit ans de plus qu’elle, il vient d’une famille aisée et il est protestant. Tout semble les opposer et pourtant, Molly va devenir la muse de l’auteur et lui inspirer ses plus belles œuvres. Entre eux, il est question d’un amour impossible, plus fort que les conventions, d’une passion des plus sensuelles qui bouscule tout mais qui doit surtout rester secrète. Elle prendra fin tragiquement deux ans plus tard mais comme toutes les belles histoires d’amour, elle restera dans les mémoires, inscrite dans l’éternité…
On ne présente plus le talentueux Joseph O’Connor, auteur, entre autres, des sublimes
L’étoile des mers et
Redemption Falls. Chantre de l’âme irlandaise, il n’a pas son pareil pour nous offrir des histoires magnifiques, qui frappent en plein cœur et nous habitent longtemps après la dernière page tournée. Avec
Muse, il a pris la liberté de raconter l’histoire d’amour entre Synge et Molly dont on sait finalement bien peu de choses. Il invente mais comme c’est un magicien des mots, on y croit, on plonge dans les pages de cet amour fou comme on en rencontre bien peu. De tout temps, Les amants maudits ont cette dimension tragique qui fait rêver et c’est le cas ici. Mais
Muse n’est pas seulement le récit de cet amour, c’est aussi une chronique du Dublin des années 1900, une période où l’Irlande connait la famine, la misère et où la religion prime sur la liberté de penser. Molly est une rebelle avant l’heure, une femme qui vit et aime selon ses désirs et ses envies et cela ne plait pas vraiment, loin de là, à la bonne société. Molly et Synge s’aimeront, se déchireront, subiront l‘incompréhension et la mise au ban d’une société puritaine et austère. A la mort de Synge, Molly continuera de vivre, elle sera même une actrice de cinéma reconnue (elle jouera pour Hitchcock) mais au fin fond d’elle, toute sa vie, elle gardera une place dans son cœur pour son cher «
adorable et vieux Vagabond »
Une histoire belle et tragique qui ne méritait pas de tomber dans l’oubli. C’est chose faite grâce à Joseph O’Connor, Molly et Synge vivront longtemps dans la mémoire de ses lecteurs et c’est une bien belle chose…
"Il sait qu'une seule chose nous distingue des bêtes : le fait que chacun d'entre nous porte en lui un Eden, un royaume de silence intérieur, que certains nomment l'âme, faute d'autre nom. La difficulté consiste à permettre aux gens de l'atteindre, même un instant, de recevoir sa bénédiction, d'être sauvés du sous-murmure crasseux de la vie."