A l'occasion de sa venue en France, au Salon du Livre de Paris, nous avons la grande chance de partager un moment avec la pétillante Irene Cao, auteur de La Trilogie italienne chez Jean-Claude Lattès, autour de délicieux macarons et autres gourmandises chez Ladurée. Nous avons découvert une jeune femme charmante, brillante, souriante et volubile, d'une grande gentillesse et très disponible pour ses lecteurs, un vrai bonheur !
Qui est Irene Cao ?On lui demande souvent s’il s’agit d’un pseudo mais non, elle écrit sous vrai nom.
Elle a fait des études de Lettres Classiques avant de se diriger vers l’Histoire et elle est docteur en Archéologie. C’est d’ailleurs cette culture classique, historique et artistique, ce bagage universitaire qu’elle essaie d’insérer dans ses livres.
Elle a enseigné à l’Université, puis elle a donné des cours d’Italien et Latin. Elle a travaillé aussi pour le cinéma (elle a eu deux petits rôles dans des films). Le cinéma est d’ailleurs son autre grande passion avec l’écriture. Elle écrit comme elle écrirait le scénario d’un film, comme si elle avait une caméra en main. C’est pour cela que ses livres ont un côté très visuel, qui nous permet de nous immerger complétement dans les scènes. La scène d’ouverture de la trilogie autour de la grenade est conçue comme un plan de cinéma, on est au cœur du fruit, puis on prend du recul et le champ s’élargit et l’on embrase toute la scène/tableau du regard.
Quand son éditrice lui a répondu d'accord pour le livre, elle travaillait dans une parfumerie. Tous ses métiers lui ont permis de croiser un tas de personnes différentes et cela a nourri son inspiration pour ses livres.
Elle est accro au thé à la menthe. Elle est super contente d’être chez Ladurée qui est bien connu aussi en Italie pour ses fameux macarons (il y a une boutique à Rome).
Comment est née la Trilogie Italienne ? Comment travaille-t-elle ?Elle compare souvent son travail d’écrivain à un accouchement (les métaphores autour de l’enfantement vont d’ailleurs revenir tout au long de l’entretien). Il lui a fallu 9 mois pour écrire les 3 tomes de la
Trilogie Italienne. En 2008, elle a terminé un premier roman qu’elle a envoyé à des maisons d’éditions. C’est ce roman qui a servi de base à la Trilogie. Il a été retravaillé, étoffé mais les scènes principales du livre ont été reprises dans la Trilogie. L’idée première de son éditeur, c’était d’en faire des nouvelles érotiques mais au fur et à mesure que le travail avancé, que les nouvelles s’étoffaient, l’idée de la Trilogie est venue et a séduit tout le monde. Du coup, elle a écrit le dernier tome en à peine un mois et demi ! Elle écrit vite parce qu’elle a dès le départ les idées claires. Elle sait où elle va. Elle savait notamment comment tout cela finirait. On en revient au cinéma : elle avait le script initial, les scènes importantes et après, elle construisait le roman autour de cela. Elle fait pareil pour ses prochains livres.
Elle attache plus d’importance au ressenti qu’à la technique, au style (qu’elle a de remarquable d’ailleurs, elle écrit merveilleusement bien). Elle écrit avec son cœur, avec ses tripes et elle espère que cela se ressent. Surtout pour ce type de romans, pour elle, c’est primordial de laisser parler son cœur si elle espère toucher celui des autres.
Elle n’a pas pris de cours d’écriture mais avec son bagage universitaire, elle avait déjà une très bonne formation. Elle écrit avant tout pour elle, cela a été un moyen de se libérer, d’évacuer le négatif dans un moment difficile de sa vie.
La Trilogie est vraiment terminée. Elle a porté à terme ses personnages et ils ne reviendront pas. Elle est dans son prochain roman, qui sera une duologie. On va sortir de l’Italie et elle aimerait bien que certaines scènes se passent à Paris. Ce sera toujours une romance érotique. Mais elle ne peut pas nous en dire plus, c’est encore top secret, même en Italie, personne ne sait rien en dehors de son éditrice !
Les blogs/forums ont joué un grand rôle dans le succès de la Trilogie, notamment en Italie. Les billets des sites spécialisés en romance ont permis de faire connaitre les livres, les vais positifs ont encouragé les gens à lire la Trilogie …
Elle sera à la prochaine édition du Romance Fiction Festival de Matera où elle présentera son prochain ouvrage.
http://www.womensfictionfestival.com/enEn Italie, cela fonctionne beaucoup avec des agents mais elle n’en a pas et n’en a jamais eu. En 2008, elle a simplement envoyé son manuscrit directement aux maisons d’éditions. On murmure beaucoup qu’en Italie, les éditeurs ne lisent pas vraiment les manuscrits parce qu’ils en reçoivent énormément et que du coup, quand on ne passe pas par un agent, c’est bien plus compliqué pour se faire éditer et elle est un peu l’exception, qu’elle n’y croyait pas quand elle a eu une réponse positive de son éditeur.
Comment réagit-elle face au succès de la Trilogie ?Elle en est très heureuse mais elle continue de vivre de la même manière. Elle ne s’attendait pas avoir un tel succès ni à recevoir autant de courrier de lectrices (c’est elle qui gère et répond sur sa page facebook), peut-être que les lecteurs ont perçu quelque chose de différent dans la Trilogie par rapport à Cinquante nuances de Grey, c’était novateur tout en restant dans le même domaine. En Italie, on la présente souvent comme la réponse italienne à EL James. Il y a de points communs mais si elle a voulu écrire autre chose, ce n’est pas vraiment comparable. Il y a d’ailleurs un lectorat masculin pour la Trilogie et cela lui plait bien !
Là, son prochain objectif, c’est de terminer son prochain roman car il y a une vraie attente et elle sent d’avantage la pression de la part de l’éditeur et des lecteurs. Mais elle a besoin de temps pour bien écrire. Le livre est attendu pour le mois de juin et il y a de grandes chances pour qu’il soit traduit en France.
Une adaptation cinématographique/ télévisuelle est-elle en projet ?C’est son rêve mais pour le moment, non. La Trilogie étant conçu comme un script de cinéma, c’ est prêt à être adapté.
Est-elle une lectrice de Romance ?Pas vraiment. Elle a lu FSOG avant d’écrire la Trilogie par curiosité mais elle lit de tout, essais philosophiques, romans, … C’est volontaire de ne pas avoir lu trop de romances pour ne pas être trop influencée par ses lectures. Cela dit, la fin de la Trilogie correspond aux codes de la Romance mais c’est parce qu’elle voulait un happy end, pas parce qu’elle voulait coller au genre.
Les personnages de la Trilogie.Dans la genèse des personnages, Leonardo est arrivé plus tard. Elle s’est beaucoup demandé quel métier il allait bien pouvoir faire. L’idée d’en faire un chef lui plaisait parce qu’il pouvait apprendre des choses à Elena mais en même temps, elle apprenait beaucoup d’elle-même et que si elle changeait, c’est bien parce qu’elle le voulait. C’est un chef, il est distingué et en même temps très sensible à tous les sens, très sensuel. Il est connecté à la terre, sensible au toucher, cela donnait une cohérence au roman. C’est encore plus présent ce rapport à la terre, au toucher dans le 3ème tome à Stromboli. Elle a choisi d’en faire une restauratrice d’art parce que de par sa formation, c’est un domaine qu’elle connait bien.
C’est important pour elle de porter une attention particulière aux paysages aussi et que les villes deviennent presque des personnages. Du coup, on a vraiment l’impression d’être dans les villes avec les personnages. Elle connait très bien la ville de Venise, elle y a fait ses études, elle y a vécu, elle a vraiment essayé de montrer sa propre vision de la ville, sortir du circuit touristique et ouvrir des lieux cachés. On retrouve vraiment l’âme vénitienne, si particulière. Elle a d’ailleurs des retours de lecteurs qui lui disent qu’elles ont envie d’aller sur les pas d’Elena et cela lui fait vraiment plaisir.
Elle connait bien Rome, elle y a travaillé dans le cinéma. Pour ses scènes, elle part de l’ambiance du lieu pour après construire son intrigue. Elle connait bien les endroits dont elle parle dans la Trilogie. Sauf pour Stromboli, elle n’y est pas encore aller mais elle espère que c’est fidèle. Cela n’a pas été trop difficile d’imaginer l’île car elle en connait d’autres du même style.
Pour Paris, il y a des choses qu’elle sent ici et qu’elle n’imagine pas ailleurs et c’est vraiment cela qu’elle veut faire passer, l’atmosphère d’un lieu.
Elle a voulu un personnage féminin pas très sûr d’elle au début et au contact de cet homme, elle va pouvoir s’épanouir et changer de caractère mais ce qui est important c’est que ce personnage masculin évolue lui-aussi, change au contact de cet homme. Dans le 3ème tome, il va beaucoup changer.
L’amitié fémininePour elle, c’est très important et ce n’est pas rien que le second livre est dédié à ses amies. C’est d’autant plus important, qu’elle a l’impression qu’en Italie, du moins dans son milieu, les femmes sont plus en train de se faire la guerre que d’être amies. Dans le second livre, Elena est vraiment sauvée par ses amis. Dans Gaia, elle a retranscrit différentes facettes de ses amies mais elle a mis aussi beaucoup d’elle-même.
Elle n’a pas voulu axer le livre que sur la composante érotique, elle a voulu rajouter d’autres composantes sur l’amitié, sur d’autres valeurs, d’autres registres et comme cela chaque lecteur peut y trouver ce qu’il veut.
Dans le 3ème livre, Elena et Gaia vont avoir une terrible dispute mais elles vont se réconcilier d’une manière ou d’une autre. Encore une autre facette de l’amitié.
Et l’érotisme dans tout cela ?C’est vraiment ce qui est à l’origine de la Trilogie.
Dans le premier roman, il y avait trois scènes explicites avec beaucoup de détails et c’est en partie ce qui a séduit l’éditeur et qu’elle a retravaillé pour la Trilogie. Volontairement, elle n’a pas voulu faire un panorama global de l’érotisme, pas du tout de SM (ce n’est pas une critique) mais elle ne se retrouvait pas dans cela. Cela lui tenait à cœur de mettre la femme en valeur, Leonardo apprend le plaisir à Elena mais sans l’humilier.
Elle a fait vraiment évoluer les personnages.
Dans le premier tome, Leonardo est plutôt antipathique mais elle voulait qu’ils changent et grandissent l’un et l’autre. Cet échange est important. Il n’y a qu’une scène dans le premier tome où il est question de bondage mais c’est très soft, rapide, c’est bien décrit et très sensuelle et c’est plutôt pour inciter Elena à utiliser ses autres sens que la vue (sens qu’elle utilise le plus car elle est restauratrice d’art), pour découvrir une autre dimension du plaisir, la libérer, l’ouvrir à autre chose. Et d’ailleurs, c’est après cette scène qu’Elena parvient à trouver la juste couleur pour la grenade dans la fresque. Elle est libérée et voit le monde différemment, en perçoit mieux les couleurs. L’importance de tous les sens, d’où aussi le titre de chaque livre « je te regarde » (titre italien).
Au sujet de la scène entre les deux femmes, était-ce vraiment nécessaire ?
C’est quelque chose qui est venu assez naturellement car cela se passe pendant le Carnaval, c’est des choses qui arrivent souvent pendant cette période. Mais une fois le Carnaval terminé, on retourne dans la vie normale et c’est fini, c’est propre à la fête. Ce n’était pas une demande de l’éditeur.
L’évolution d’Elena dans le second tome est différente de celle du premier, pourquoi ? Qu'en est-il du 3ème tome ?Elena a fait un choix à la fin du tome 1 et c’est ce choix qui transparait dans le tome 2. C’est ce choix draconien qui est le thème principal du livre. En tant que femme, c’est une décision importante et elle voulait vraiment mettre en avant ce choix qu’elle fait avec son cœur, en écoutant ce qu’elle ressent. Même si à la fin du tome 2, elle est seule avec ses amies, elle laisse parler son cœur. Elle n’est pas dévastée, elle va aller de l’avant.
Dans le troisième tome, le personnage d’Elena a beaucoup étonné la presse italienne car on ne la reconnait pas vraiment car elle change beaucoup. Elle est perdue et son évolution est plutôt négative mais elle va avoir un déclic et vivre encore une nouvelle renaissance.
Dans les 2 et 3 tomes, elle est bien plus conscience des changements, mais tout le mérite ne va pas à Leonardo, elle prend les choses en mains de plus en plus conscience de qui elle est, de ce qu’elle veut.
Et la fin de la Trilogie est positive, c’était important pour elle d’avoir une fin heureuse.
Elle a laissé parler ses personnages, ils lui parlaient presque et voulaient cette note positive ;) Elle ne sentait pas le cœur ou le courage de faire une fin tragique, de les séparer.
Le lien avec sa terre maternelle sera très fort dans ce 3ème tome pour Leonardo. Il est un chef différent là-bas, il n’est plus en veste de chef, il a un rapport plus brut avec la nourriture, il est presque métamorphosé ou il a retrouvé son vrai lui. C’est une île avec un volcan et cela amène une énergie incroyable, particulière, les 4 éléments sont présents (air/terre/eau/feu), elle joue beaucoup sur cette métaphore toujours un besoin d’avoir un lieu cohérent avec son intrigue.
Elle a un rapport particulier avec ce 3ème tome. Elle l’a écrit dans un moment de grande fatigue, rapidement. En plus, en arrivant au terme de la Trilogie, elle connaissait encore mieux ses personnages, elle avait un confort d’écriture plus grand par rapport à eux.
Un grand merci à toute l'équipe des éditions Lattès pour ce très bon moment ! Et un énorme Merci à Irene pour sa gentillesse, son sourire et sa merveilleuse Trilogie, que de bons moments de lecture en compagnie d'Elena et Leonardo, vivement le sortie du tome 3 !