CHASE Loretta - DRESSMAKERS - Tome 1 : Sur la soie de ta peau

Sur la soie de ta peau
Loretta Chase

Sortie le 2 mai 2012

"-Le mot que vous cherchez est... style, Votre Grâce". Le duc de Clevedon se demandait justement quelle qualité indéfinissable rendait Mme Noirot si fascinante. Celle qui ose se présenter comme "la plus grande couturière du monde" veut le convaincre que sa future femme doit lui commander toutes ses toilettes si elle veut tenir dignement son rang. Sous cette apparence gracieuse, Mme Noirot est une redoutable femme d'affaires. Clevedon devrait lui rire au nez. Il en est incapable. Car, bien que ses fiançailles soient sur le point d'être annoncées, c'est cette adorable roturière qui occupe toutes ses pensées.

Mon avis :

Depuis le merveilleux Prince des Débauchés et le très décevant La Fille du Lion, j’attends toujours avec appréhension le dernier roman de Loretta Chase. De quel côté la balance littéraire et émotionnelle va-t-elle pencher ? Sur la Soie de ta Peau est le premier tome de la série Dressmakers (les Couturières), j’ai d’abord flashé sur la couverture puis sur le titre et au final, j’ai adoré ce roman du début à la fin! A noter: ce livre est finaliste des RITA Awards 2012 dans la catégorie Romance Historique.

Dès la première phrase, le nom de DeLucey nous interpelle: c’est celui de Bethsabée, l’héroïne et épouse de Benedict dans le tome 3 des Carsington, Un Lord si parfait. Mais il s’agit là d’une autre branche des DeLucey, plus sulfureuse et à la très mauvaise réputation. Les trois sœurs Noirot, Marcelline, Sophia et Léonie sont le fruit de l’union scandaleuse entre Catherine DeLucey et Edouard Noirot (français en exil à la Révolution), nobles désargentés qui se sont enfuis à Gretna Green pour se marier et qui ont mené une vie de bohème, usurpant diverses identités et abandonnant l’éducation de leurs filles aux bons soins d’une tante couturière de profession.
Ce premier tome a pour héroïne l’ainée des DeLucey, Marcelline. Elle tient avec ses sœurs une boutique de Couture pour Dames à Londres. Sûre de son talent et de son génie, Marcelline aspire à développer l’entreprise familiale et pour cela, elle a un objectif : habiller Lady Clara future Duchesse de Clevedon et coqueluche de la noblesse anglaise. Et pour parvenir à ses fins, elle choisit de s’adresser à celui qui tiendra les cordons de la bourse et des futurs achats de Clara, son futur époux, Gervase Angier, septième Duc de Clevedon. Problème : le Duc en question tarde à faire sa demande officielle et préfère profiter encore de son célibat à Paris. Qu’à cela ne tienne, Marcelline se rend en France, bien décider à l’éblouir et à lui expliquer ce qu’est le style, ce je-ne-sais-quoi qui change tout. Et là, surprise, Clevedon est séduisant et intelligent mais s’il est aussi intrigué et attiré par Marcelline, non seulement par son style mais par toute sa personne qu’il compte bien mettre dans son lit ! Et Marcelline n’est pas certaine de pouvoir le tenir à distance et lui résister bien longtemps …

J’ai dévoré ce roman à l’atmosphère particulière et envoûtante. Marcelline est une héroïne à part, comme on en rencontre peu dans les romances historiques. C’est une femme qui a les pieds sur terre, qui va au bout de ses objectifs. Elle peut paraitre distante, calculatrice et arrogante mais elle cache surtout un profond besoin de sécurité, de stabilité et elle sait que pour obtenir cela pour elle, sa fille Lucie et ses sœurs, il n’y a qu’un moyen: avoir de l’argent. Clevedon est un être difficile à cerner. C’est un homme superbe, hautain et qui s’ennuie profondément. Il a fui l’Angleterre depuis 3 ans, préférant goûter les plaisirs et la liberté qu’offre Paris. Mais en fait, sous cette apparente légèreté, c’est un homme blessé, seul et hanté par les souvenirs d’un passé familial douloureux. Entre les deux, la rencontre est explosive. Clevedon est totalement déstabilisé par cette femme audacieuse et directe, il n’a jamais connu cela. Les dialogues sont savoureux, de vraies joutes verbales piquantes et à double sens. On retrouve une Loretta Chase au sommet de son art et c’est jouissif ! Certaines situations sont rocambolesques et surréalistes mais écrites par elle, c’est magique, cela fonctionne à merveille, on se laisse complètement embarquer par l’histoire et on y adhère totalement. Si certaines scènes sont drôles et frivoles, n’oublions pas que nous sommes dans un roman sur la mode et ses couturières, d’autres moments sont émouvants et bouleversants. La fin du chapitre 12 et tout le 13 notamment sont juste sublimes. Je l’avoue, j’ai versé une larme ou deux (voir plus !). C’est doux, pudique, sensuel, un interlude romantique et charnel, teinté de désespoir comme sait si bien les écrire Loretta Chase, à savourer, à déguster lentement.
Autour de ce couple improbable, l’auteur nous présente aussi les futurs héros de la série. Les sœurs DeLucey, Sophia et Léonie, sont à l’image de leur ainée : singulières et effrontées. Elles nous promettent de très bons moments de lecture ! Il y a aussi Clara et son frère Lord Longmore, le meilleur ami de Clevedon. La première se révèle, s’émancipe au fur et à mesure du livre, se permettant même une sortie magistrale, le second semble intrigué (attiré ?) par Sophia, vu le caractère des deux, nous allons bien rire ! Et enfin, il y a Lucie, petit monstre charmant et délicieux de 6 ans. Adepte des fugues et des usurpations d’identités, la princesse Erroll D’Albanie séduit déjà tout le monde par son audace et son aplomb, c’est vraiment la digne fille de sa mère !

C’est une lecture bonheur, on ne voit pas le temps passer et l’on s’évade vraiment loin, très loin du quotidien et du présent. Loretta Chase est l'un des plus grands auteurs de romances historiques et elle le confirme magistralement avec Sur la soie de ta peau. Un vrai coup de cœur !

Florilège de citations :

Première fois que Clevedon voit Marcelline :

« La première chose que vit Clevedon fut le dos de la belle brune: des épaules arrondies, d'une blancheur laiteuse, une nuque délicate, surmontée d'une cascade de bouclettes serrées qui s'échappaient du chignon. La robe dévoilait un peu plus de chair que les Parisiennes ne l'estimaient séant.
Fasciné par ce spectacle, il oublia sur-le-champ Clara et Mme Saint-Pierre, ainsi que toutes les autres femmes de la planète.
Il lui sembla qu'une éternité s'écoulait avant qu'il ne soit autorisé à se présenter face à elle. Il découvrit alors deux yeux sombres et brillants, illuminés d'une étincelle joyeuse et une bouche large, aux lèvres pleines, aux coins retroussés par un demi-sourire coquin.
Elle eut un mouvement presque indécelable - une sensualité qu'il eut l'impression de voir une femme se tourner dans le lit de son amant.
Une tension inconfortable naquit au creux de son pantalon.
Un reflet de lumière dansa dans sa chevelure soyeuse.
De là, le regard de Clevedon descendit sur le renflement des seins, nichés dans le décolleté plongeant. Il avait vaguement conscience du bruit des conversations autour de lui, mais fut foudroyé par sa voix lorsqu'elle s'exprima à son tour, une voix basse de contralto, légèrement voilée.
Elle s'appelait Mme Noirot. »

Où il est question d’une certaine partie de l’anatomie du duc :

« Il enfouit son nez dans le cou de la jeune femme, désespérément consciente de la dureté de ce grand phallus ducal qui s'était réveillé bien avant son noble cerveau ».

C’est tellement beau :

« Il l'enlaça, la ramena contre lui. C'était si bon! Ce corps tiède et souple qui se coulait contre le sien,
s’imbriquait à la perfection, comme moulé par Belzébuth lui-même dans les ténèbres de sa forge infernale … Enfin, il la tenait dans ses bras. Il ne voulait rien d’autre. Seulement la tenir. La garder.
Sienne.
Cet instinct de possession primaire éradiquait toute autre pensée dans son cerveau.
D'un large geste du bras, il balaya les objets posés sur la table qui dégringolèrent dans un doux fracas.
Puis il la souleva, l'assit sur le plateau.
Comme elle plaquait les mains sur sa poitrine pour le repousser, il les retint sous les siennes, les maintenant au-dessus de son cœur tambourinant. Leurs regards se nouèrent et il se noya avec délectation dans ces deux lacs d'une profondeur insondable.
Il ne connaissait même pas son prénom, ne savait pas « Noirot » était son identité véritable ou un nom d'emprunt, si elle avait réellement été mariée. Il s'en fichait.

Brusquement, elle lui saisit le visage à deux mains pour l'attirer vers elle, noua les jambes autour de ses reins. Puis elle l'embrassa sans aucune retenue, exigeant qu'il ne retienne rien en retour. Il lui rendit son baiser avec la même fougue qu'il muselait depuis si longtemps. Il ne la connaissait que
depuis quelques semaines et pourtant il avait l'impression de l'avoir désirée toute sa vie, d'avoir passé une éternité hanté par ses rêves, ses fantasmes et ses souvenirs interdits.
Mais aujourd'hui il ne rêvait plus. Et il se sentait plus vivant que jamais, un peu comme s'il avait été un somnambule qui se réveillait enfin. »

Je l'ai enfin lu et effectivement j'ai beaucoup aimé aussi ! Du bon Loretta Chase et j'espère qu'on aura bientôt l'histoire de Sophie et Longmore !

Voilà... 2 jours extra en compagnie de Sa Grâce et de Madame Noirot !!!

Alors, je voyais un peu le schéma de l'histoire arrivé : que le duc finisse par se rendre compte de ses vrais sentiments envers lady Warford, puis Marcelline, et vraiment petit à petit.

Après, ça reste génial, en grande partie grâce à la plume de Loretta Chase. Elle fait passer les émotions justement, sans verser dans le drame. C'est fluide, bien conté, avec les mots qu'il faut. Elle dépeint vraiment bien les côtés aventurier, déterminé et intègre de Marcelline ; ainsi que celui plus discret et attentif de Clevedon.

Il y a la première partie à Paris, plutôt comique, où ils se cherchent tous les deux dans des joutes verbales et des paris très sympa ! Avec des détails tels que l'échange de la broche et la perle, les "ruses" du black-jack, la robe givre du bal, on est tout de suite dans leur monde. Marcelline est super, elle a toujours la répartie qu'il faut ! & Clevedon aussi en duc très bel homme et bien intrigué par la couturière !

Il y a ensuite le passage sur le bateau assez drôle et très mignon^^

Enfin, à Londres, c'est les sentiments qui priment. On découvre la boutique des Noirot et Lucie alias Erroll (la fille de Marcelline - je l'ai adoré !). Entre la robe de lady Warford à confectionner, le rapprochement de Clevedon des Noirot (Marcelline/Lucie), le désir qui grimpe entre nos deux protagonistes, on est en plein dans l' "aventures et passions".

Je suis très contente de cet A&P !!! Et maintenant je relis les citations que tu as mises Fariboles, elles sont géniales !! Aller, d'autres petites :

Citation :

A présent, il ne restait plus que la camisole et ses bas.
Elle marqua une deuxième pause, ravie par la lueur de plaisir qu'elle voyait luire dans ses yeux.
-- Vous me faites mourir à petits feu, dit-il d'une voix sourde.
-- Quelle belle mort.
Elle posa un pied sur le lit, près de sa cuisse, retroussa sa camisole pour révéler son genou. Clevedon émit un bruit étranglé.

Citation :

-- Avez-vous perdu la tête ?
-- Le tête, je sais pas. Le ceur, oui, très certainement.