GUIBE Mathieu - Even dead things feel your love

Even dead things feel your love
Mathieu Guibé

Sortie le 1er mars

Au terme de votre vie, à combien estimez-vous le nombre de minutes au cours desquelles vous avez commis une erreur irréparable ? De celle dont les conséquences régissent d’une douloureuse tyrannie vos agissements futurs jusqu’au trépas. Mon acte manqué ne dura pas plus d’une fraction de seconde et pourtant ma mémoire fracturée me renvoie sans cesse à cet instant précis tandis que la course du temps poursuit son inaltérable marche, m’éloignant toujours un peu plus de ce que j’ai perdu ce jour-là. Je me demande si notre dernière heure venue, les remords s’effacent, nous délestant ainsi d’un bagage bien lourd vers l’au-delà ou le néant, peu importe. Puis je me souviens alors qu’il s’agit là d’une délivrance qui m’est interdite, condamné à porter sur mes épaules ce fardeau à travers les âges, à moi qui suis immortel.

L’amour ne devrait jamais être éternel, car nul ne pourrait endurer tant de douleur.

Even Dead Things Feel Your Love est un de ces livres qui se lit en douceur, afin d'en apprécier chaque mot et chaque phrase. Pendant ma lecture, je pouvais presque voir l'ombre du héros me confesser son histoire. J'ai été complètement happée dans son époque et ses décors typique du XVIIIe siècle, et cela grâce à la plume si riche de Mathieu Guibé. C'est un livre plein de poésie, d'amour et de désespoir, un livre qui m'aura beaucoup touché !

Lord Josiah est un vampire qui quitte Londres pour la province. Josiah fuit l'effervescence qui règne autour de la ville et de ses machines, mais surtout il veut s'éloigner de ses ennemis les chasseurs. Il se rend au calme et à l’abri, dans sa demeure de Crimson Dawn. Un jour de chasse il se promène en forêt afin de se nourrir, mais il tombe sur une scène des plus étonnante : une jeune femme pleine d'insouciance et de beauté caresse tendrement le cou d'un renard au bord du trépas, la mort n'a pas l'air de l'effrayer. Elle, si vivante apporte tant de douceur et d'amour à cette petite chose qui se meurt, et le renard la regarde et ressent toute cette attention, alors le déclic se fait en Josiah «Même les choses mortes peuvent ressentir l'affection, l'amour... ». Cette vision et cette phrase scellera leur destin...

Pour plus d'informations importantes qui se déroulent au tiers du roman...

Spoiler:

Lord Josiah représente parfaitement le vampire blasé, à l'allure et la grâce aristocratiques. C'est un héros torturé, rempli de doutes. Il ne nous épargne pas les détails de ses vices, car c'est avant tout une créature de l'ombre, et donc parfois il tue et torture ses victimes. Son obsession pour cette humaine le mènera par moment au bord de la folie et de la déchéance.

Quand à Abigale, elle est si douce, pleine de tendresse et d'amour, que c'en est touchant et douloureux à la fois. C'est une jeune femme passionnée et vive. Par amour elle est aussi prête à tout pour lui, même si cela lui cause de la souffrance.

Tout au long de la lecture nous somme torturés par nos deux héros et nous nous demandons quelle issue ils trouveront, et ce n'est qu'à la dernière page que nous avons notre réponse.

Ce que je retiens le plus de ma lecture est l'amour obsessionnelle de Josiah et les tourments pour cet être condamné à vivre pour l'éternité, mais aussi l'écriture, si belle et si profonde. C'est un livre magnifique et sombre dans un décors somptueux, c'est poétique et triste mais tellement beau à la fois. Je ne voulais pas finir ce livre tellement j'étais immergée dans cet univers pourtant mélancolique.

Un énorme merci aux éditions du chat noir et à Mathieu Guibé pour cette belle découverte !

Quelques phrases qui donnent le ton d'Even Dead Things Feel Your Love

« -Vous m'avez demandé ce que j'étais comme jouet. Je suis ce diable à ressort. D'apparence, rigide, sobre et inoffensive, une fois la boîte ouverte, le monstre jaillit, totalement incontrôlable et tellement effrayant. On peut fermer la boîte, mais le diable demeure à l'intérieur et bien qu'il soit invisible, on sait qu'il est là et l'on redoute l'effet de sa prochaine apparition. Je suis un jouet que l'on offre pour faire une mauvaise blague, je ne suis pas de ces jouets que l'on rêve de posséder étant petit fille. »

« Je maudissais le soleil, non parce que qu'il me rabaissait au rang d'homme faible, mais parce que Dame pudeur demeurait dans les gouttes de pluie, là où nos larmes pouvaient se confondre à la perfection. Par cette radieuse journée tous témoignaient que le vampire ne pleurait pas. Et pourtant … Pourtant, j'étais sans nul doute le plus meurtri de l'avoir perdue. »

« -Parce que ce manque, je le vis comme la pire des tortures. Affranchie de toutes sensations physiques, je perçois pourtant cette douleur presque viscérale à chaque instant où je voudrais pouvoir te toucher, à chaque instant où je voudrais simplement t'embrasser. Ce désir impérieux de sentir ton corps brûler en moi... Josiah, ne te mens plus, si je suis autant irradiée par cette frustration inaltérable alors je n'ose imaginer les démons qui te persécutent jour après jour. Tu en as assez enduré, tu en as trop enduré... »

« Abigale était bel et bien la seule à éveiller en moi tant d'émotions, tant d'émoi et surtout tant d'humanité. Nous ne formions plus qu'un, nos deux corps symbolisèrent bien plus qu'une simple fusion physique et sentimentale. Nous étions une entité unique, bien supérieure à la somme de nos deux êtres. Nous étions l'univers, de l'infiniment grand à l'infiniment petit, nous étions le temps, distendu et perpétuel, bref et figé. »