Real Humans

Real Humans
Lars Lundström (Suède) - 2012

Äkta Människor ("les véritables humains") se situe dans un monde parallèle où les robots humanoïdes (Hubot) sont devenus des machines courantes dans la société. Ces Hubots sont très réalistes et sont configurés de telle sorte à remplir une large demande. S'adaptant à tous les besoins humains, de la simple tâche ménagère à des activités plus dangereuses voire illégales, la société semble en dépendre. Une partie de la population refuse alors l'intégration de ces robots tandis que les machines manifestent des signes d'indépendance et de personnalité propre.

Real Humans : l’homme sera toujours un hubot pour l’homme

Les séries scandinaves ont la cote depuis quelques années sur Arte. Et ça se comprend : cette série va en fait bien au-delà des autres traitements de la vie robots-humains. Il convient moins en réalité de parler d’un monde parallèle que d’un futur qui au final ne semble pas si lointain : en fait, l’action peut très bien se dérouler en 2013, puisque la seule marque de « modernité » est la présence de ces robots, d’un magasin pour les vendre et du minimum de technique qu’il faut pour qu’ils fonctionnent. Donc pas d’overdose de gadgets, voitures futuristes, j’en passe et des meilleurs.

Le scénario est vraiment bien fait car on se rend vite compte à la moitié de la saison 1 que l’on s’est véritablement fait berner : cette première saison traite de la question de la cohabitation humains-robots (ont-ils une âme, des sentiments, le fait d’être refusé à certains endroits en société car l’on vit, couche avec son robot constitue-t-il une discrimination ? etc…), soit autant de pistes de réflexion tout à fait intéressantes mais qui nous égarent également… En effet, peu à peu, quand la série bascule dans le thriller et le suspens puis semble perdre en intensité intellectuelle, on découvre au final que la vraie réflexion est ailleurs : je ne vais pas en dire trop pour ne pas gâcher l’intérêt de la chose, mais se pose aussi la question d’une nouvelle sorte de transhumain, d’un mélange robot-humain pour assurer la survie de l’humanité (le mot « hubot », désignant ces robots, est d’ailleurs une contraction de « robot » et « humain »). Finalement, l’homme n’est-il pas amené à évoluer ?

C’est là également que la série fait mouche : elle a le don de se rattacher fidèlement aux comportements humains. Ainsi, on propose à des humains vieux ou très malades d’être « sauvegardés » et ainsi d’être clonés après leur mort sous forme de ces fameux robots, où leur « âme » (goûts, humeur, souvenir…) serait en quelque sorte transplantée. Et que dit le formulaire d’information sur le sujet dans la série ? « Parlez-en autour de vous ». On croirait lire une formule sur le don d’organe ou sur la possibilité de livrer son corps à la science. D’où un message parlant, une question dans la continuité de celles que l’on se pose aujourd’hui : serions-nous prêts à admettre la création d’un clone nous ressemblant en tout point pour perpétuer notre image auprès de nos proches ?
Les réactions des protagonistes de la série sont également très assimilables, on s’identifie à eux : ceux qui se sentent attirés par eux (sexe et vie en commun plus largement), au contraire ceux farouchement opposés à ces hubots (Real Humans est le parti anti-hubot existant dans la série), ceux qui hésitent, qui tiennent à faire reconnaître des droits à ces « machines », ces « pacman ».
On retrouve des éléments, des phénomènes de nos sociétés passés au prisme : des milices terroristes, des trafics illégaux… Et au milieu de tout cela, des hubots qui cherchent à s’émanciper, mais qui pour certains semblent tous aussi vivants et doués de la faculté de pensée que des humains lambda.

Au-delà du réalisme et du charisme de la série, sa réalisation est vraiment agréable : c’est bien joué, avec un travail de titan fourni par les acteurs incarnant les hubots, sans manière de filmer à l’américaine… Même les moments plus intenses sont filmés sobrement mais retranscrivent justement l’émotion et nous font palpiter. On navigue parmi les différents groupes d’humains et d’hubots sans jamais s’y perdre et chaque épisode amène une nouvelle source de réflexion. On a alors plusieurs thématiques toutes passionnantes à suivre…
Quant aux personnages, à vous de les découvrir, et comme ils évoluent dans la série, je préfère ne rien dévoiler !

Un bémol : l’utilisation de flash-back, en soi très louable et utile, est assez lourde et cliché (blanc, bruit de flash, ralentis…), dont on se passerait bien, tant cette série réussit à innover et à surprendre. Petit détail qui ne gâche rien autrement !

Seule chose à dire : ni les héros ni le spectateur ne sortent indemnes de cette série riche et complexe, allant d’une intrigue de réflexion à une traque mettant tout le monde sous pression. Tellement que ça devient une belle addiction… A voir au plus vite donc !