Mon avis : Il y a un peu plus d’un an,
Les Roses de Somerset, premier livre des éditions Charleston sortait. C’était une grande saga sur fond de trahison, rivalité et amour et surtout, elle donnait le ton de la maison : de la belle littérature, différente, qui fait du bien, nous invite aussi à réfléchir, nous fait voyager le temps de magnifiques lectures. Depuis, à chaque sortie de Charleston, c’est le même bonheur, la même magie, on en prend plein les mirettes, on se régale, on tourne les pages sans voir le temps passer. Alors un grand MERCI à ces éditeurs qui nous permettent d’autant rêver et soupirer loin d’un quotidien bien morose parfois !
Mais revenons un peu à cette
Plantation, préquel des
Roses. Que dire si ce n’est que j’ai adoré, je pense que je l’ai même préféré au premier opus de Leila Meacham. C’est encore plus foisonnant, poignant aussi, cela nous parle de courage, d’espérance, d’amitié et d’entraide, de ces hommes et femmes qui ont osé partir à l’aventure, aller là où tout était à construire et bâtir un nouveau monde. Mais comme rien n’est rose bonbon ni parfait, il est aussi question d’esclavage, d’ambition implacable, d’orgueil démesuré… En résumé, tout est là pour nous offrir une superbe saga sur laquelle souffle le vent de l’Histoire avec un grand H !
Silas Toliver a tout pour réussir : il est beau, intelligent, ambitieux, bien né, fiancé à Lettie, jeune femme magnifique et comme c’est un Toliver, un vrai, il a la terre et le coton dans le sang. Seule ombre au tableau, au décès de son père, il est sous le choc lorsqu’il apprend que la plantation familiale de Charleston revient dans son intégralité à son frère ainé. C’est plus que son orgueil ne peut supporter, il décide alors avec son meilleur ami Jeremy Warwick de partir pour les terres vierges du Texas afin d’y bâtir sa propre plantation, Somerset. Le voyage et l’installation promettent mille dangers : des milliers de kilomètres avec un convoi lent et vulnérable, la Guerre avec le Mexique est imminente, les indiens chassés de leurs terres ancestrales sont aussi en révolte mais l’espoir est là, la fortune à portée de main… Problème : ses finances sont au plus bas et c’est pour cela qu’il accepte l’odieux marché d’un riche planteur : épouser sa fille, la rebelle Jessica, qui fait honte à sa famille en épousant la cause abolitionniste et en fréquentant des Noirs, en échange d’une forte somme d’argent…
La Plantation, c’est le livre parfait par excellence, celui dont les personnages vont nous accompagner un sacré moment et qui donne envie de crier au monde entier « mais bon sang qu’est-ce que tu attends, il faut que tu lises cette merveille !!! ». Leila Meacham évite les pires écueils de la saga historique. Elle ne plombe pas son récit avec des millions de références aux petits détails de l’Histoire, ne nous abreuve pas de batailles sanglantes, ne tombe pas dans le côté héros super héroïques, invincibles, sans faille qui sauvent le monde toutes les deux pages. Non, ici, cela nous parle avant tout d’êtres humains avec des faiblesses mais surtout courageux comme seuls les vrais héros peuvent l’être. Ils se tiennent debout dans la tourmente et affrontent tout avec confiance, foi et ils changent, évoluent. Sous nos yeux, on assiste à la naissance du Texas, terre hostile et dangereuse, bien loin encore des champs de pétrole et des fermiers milliardaires. Là, c’est un territoire à conquérir, un monde âpre, qui n’épargne rien ni personne. Nos personnages vont souffrir, surtout les Toliver sur lesquels plane une malédiction (oui oui, on en apprend davantage sur cette mystérieuses malédiction des
Roses de Somerset). Mais là où c’est beau, émouvant aussi, c’est de voir les trois familles, les Toliver, Warwick et Dumont faire sortir de terre leur ville, Howbutker. On comprend alors mieux l’influence de ces fondateurs sur le Texas. On en apprend aussi beaucoup sur les réseaux abolitionnistes dans le Sud et sur les risques que prenaient ces gens courageux et altruistes. L’esclavage est abordé sans excès ni pathos mais plutôt dans ce qu’il a de plus abjecte : la négation du statut d’être humain des Noirs. Les planteurs les perçoivent comme des bêtes, incapables d’amour ou raison et pour moi, c’est encore pire que des descriptions de maitres violents fouettant et torturant. La scène où Silas prend conscience de tout cela est d’ailleurs magnifique, l’une des plus touchantes du livre. A travers les yeux de Jessica, on voit générations se succéder à Somerset et Howbutker et chacune apporter sa pierre à l’édifice, essayer d’être digne des illustres aïeux, pas toujours évident d’ailleurs. C’est un personnage superbe, mélange réussi de passion et de courage, aimante et têtue, une belle héroïne comme on les aime.
Un livre superbe qui renoue avec la tradition des grandes sagas américaines comme
Autant en emporte le vent, Nord et Sud, Charleston, … Vous savez, ces livres qui nous font tant vibrer, qui nous enflamment et nous poussent à veiller tard, parce que « encore un chapitre… et puis un autre… et encore un autre… » Attention, lecture hautement addictive mais bon sang, que cela fait du bien !