ZENTNER Alexi : La légende de Loosewood Island

La légende de Loosewood Island
Alexi Zentner

Sortie le 27 août 2014

La famille Kings habite sur l'île de Loosewood depuis trois cents ans. Les richesses de la mer et l'abondance des homards ont permis à toutes les générations de régner sans partage sur l'activité de la pêche. Après la disparition tragique de son petit frère, Cordelia va reprendre la couronne que lui cède son père. Partagée entre les rivalités avec ses deux soeurs, la lutte farouche qu'il lui faut mener contre les trafiquants de drogue qui transitent dans les eaux poissonneuses de l'île à quelques encablures de la terre ferme et l'amour qu'elle porte au marin de son bateau, la jeune fille doit résister aux dangers qui l'entourent et rendent son avenir incertain.
Le récit formidablement réaliste et poétique est nourri des mythes qu'Alexi Zentner sait si bien susciter, comme dans son premier roman, Les Bois de Sawgamet. Il nous offre ici un conte inoubliable.

J’avais passionnément aimé Les bois de Sawgamet, le premier livre d’Alexi Zentner (pour être honnête, il est même dans le top 10 de mes livres préférés) et j’attendais beaucoup de son nouveau roman, l’intrigante Légende de Loosewood Island. Là aussi, j’ai tout simplement adoré, le relisant trois fois pour bien le savourer, l’appréhender. C’est magnifique, puissant, lyrique, poétique, épique, un vrai livre à vivre, à ressentir.

L’histoire du livre est simple… de prime abord du moins. Mais avec cet auteur, plus on avance dans notre lecture, plus on s’immerge dans son récit, plus l’on comprend que rien n’est évident, simple et logique. L’histoire de la famille Kings et de Loosewood Island, petite île du Maine sont intimement liées. Depuis le XVIIIème siècle, les Kings sont les rois du homard, des pêcheurs bénis par l’océan qui ramènent des casiers bien garnis. Mais comme souvent, là où il est question de don, de bénédiction, on trouve aussi une malédiction. L’ancêtre de la famille, le peintre-pêcheur Brumfitt Kings rêvait d’avoir une épouse et une descendance pour adoucir sa solitude. Et l’océan l’a écouté, lui offrant une femme sortie des eaux et les richesses de la mer en abondance mais en contrepartie de tout cela, il y a un prix à payer, élevé, très élevé : l’ainé des fils Kings serait toujours repris par l’océan.
De nos jours, Cordelia Kings a la mer et la pêche dans le sang, elle n’est heureuse que sur un bateau, les embruns lui fouettant le visage, luttant pour arracher un lourd casier aux flots déchainés. Elle a vu son frère Scotty mourir sous ses yeux, sa mère s’est suicidée, les laissant, ses sœurs et elle avec un père sévère mais juste et aimant. Mais Cordelia est une battante, que rien n’arrête ! C’est une Kings, la digne héritière de Brumfitt, mais c’est aussi la première femme à être à la tête de son homardier. Les autres pêcheurs, à commencer par son père, le vrai roi de l’île, la respecte et voit en elle l’avenir de Loosewood Island mais pour cela, Cordelia va devoir s’accepter, accepter ses failles et panser les blessures de son passé… pas facile lorsque l’on a en soi tout l’orgueil des Kings !

Ce qui est complétement fou avec ce livre, c’est que l’on en vient à croire en l’existence de Brumfitt Kings et de ses tableaux. J’ai même parcouru tout le net pour vérifier car Alexi Zentner le rend tellement vivant, restituant parfaitement l’âme de tableaux imaginaires qu’on a la sensation de le voir, de les contempler… Et du coup, on en vient à ne plus savoir ce qui est vrai ou non, quelle est la part de vérité dans la légende de Loosewood (l’île existe-t-elle d’ailleurs ?) ? Nous sommes perdus, plongés dans le roman pour notre plus grand bonheur ! L’histoire en elle-même est captivante, on est sur l’île avec nos héros, on ressent la dureté d’une vie insulaire loin de tout où l’on croise toujours les mêmes personnes, où solidarité et entraide sont deux amis indispensables et fidèles. Les descriptions des paysages et des sorties en mer sont magiques, poétiques. On a la sensation de vivre une aventure hors norme avec des personnages, des personnalités comme on en rencontre peu. Cordelia et son père sont tellement attachants, des êtres complexes, bourrus mais avec un cœur en or, qui se préoccupent vraiment de ceux qui les entourent. Ils ont du mal à mettre à nu leurs sentiments mais quand ils le font, waouh, c’est merveilleux, hyper touchant. Certains passages brisent le cœur, on a du mal à s’en remettre, on vit ses pages, on retient son souffle et on souffre avec nos héros. C’est à la fois tragique et lumineux, mélancolique et plein d’espoir. Une vraie belle histoire, captivante et fascinante.

J’ai plus qu’adoré cette Légende de Loosewood Island. Je vais chérir ce livre, le relire, en parler, l’offrir, le faire voyager… A dévorer vite, très vite !