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 Rencontre avec Matthew Thomas - Paris, le 12 janvier 2015

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Cheshire Cat

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MessageSujet: Rencontre avec Matthew Thomas - Paris, le 12 janvier 2015   Rencontre avec Matthew Thomas - Paris, le 12 janvier 2015 Icon_minitime1Jeu 22 Jan - 23:23

Rencontre avec Matthew Thomas - Paris, le 12 janvier 2015 Nousm11

Nous avons eu la chance de rencontrer Matthew Thomas de passage en France pour nous présenter son premier roman "Nous ne sommes pas nous-mêmes". C'est un auteur extrêmement sympathique qui est à suivre, d'autant que les droits pour une adaptation cinématographique du livre ont déjà été acquis et le roman est/va être traduit en de nombreuses langues étrangères.

Un grand merci à Belfond (et plus particulièrement à Brigitte Semler).

Rencontre avec Matthew Thomas - Paris, le 12 janvier 2015 Wp_20111

1- Bonjour,
Tout d'abord merci de m'accorder cette rencontre.
Je tiens à vous dire que j'ai été particulièrement émue par certains passages de votre livre, notamment lorsque vous faites dire à l'un de vos personnages que « la vie est plus qu'une question d'équilibre entre victoires et défaites », que « nous vivons pour aimer et être aimés » ou encore par la discussion entre un père et son fils au sujet de l'euthanasie. Et j'ai également été sensible à votre « témoignage » dans le Time en août 2014 au sujet de l'Alzheimer précoce de votre père.
Mais qu'est-ce qui vous a conduit à écrire votre livre sur cette thématique ?


Eh bien je voulais parler de la maladie d'Alzheimer, d'abord car j'avais une vraie expérience personnelle. Puis j'ai finalement décidé de ne pas écrire en partant seulement de cette expérience.
Il fallait que je puisse trouver une dimension plus large que celle de mon histoire personnelle pour ce livre. Et je savais que si je n'arrivais pas à développer cet aspect dans le livre, je n'écrirais pas au sujet de cette maladie car je ne souhaitais pas écrire une biographie.
Je voulais créer un roman, au sens classique du terme, aussi bien pour la forme que pour l'articulation des parties entre elles et les principes généraux de déroulement des romans à succès. Et lorsque je me suis arrêté pour observer l'ensemble des éléments que j'avais réussi à réunir et que je me suis demandé s'il y avait dans toutes mes notes assez pour créer un contexte plus large, j'ai réalisé qu'avec cette détérioration de la santé physique des malades, ceux-ci ressentaient une perte de contrôle, un besoin de compagnie, que quelqu'un prenne soin d'eux, les aime inconditionnellement. Et je me suis dit que c'était probablement quelque chose qui allait à l'encontre de nombre de tendances et cultures modernes, à l'opposé de l'individualisation et de l'idée que la vie est une expérience personnelle avec un idéal à atteindre seul.
Et la capacité à organiser la moindre de nos expériences est une notion contemporaine comme si la vie pouvait être fragmentée en morceaux classifiables et indépendants les uns des autres... la notion même que nous pouvons « dompter » la mort est une thématique moderne. Nous pouvons travailler sur notre corps, organiser notre temps, notre vie amoureuse... Nous pouvons organiser ce chaos qu'est le fait d'exister.  
Les esprits contemporains pensent que les volontés individuelles contrôlent l'univers et que toutes les technologies à disposition rendent cette possibilité de contrôle possible.
Et je voulais écrire un livre qui dévoile l'aspect mensonger de cette pensée ainsi que la tristesse occasionnée par une notion pareille, car c'est vraiment à travers les relations humaines que nous pouvons être heureux... Ce n'est pas atteignant un idéal uniquement personnel et matériel (acheter une maison, avoir un travail...) que nous parviendrons à être réellement heureux.
Cette maladie représentait pour moi un moyen de découvrir le monde sous un autre angle.

2- Y a-t-il d'autres éléments dans votre livre inspirés par votre vie personnelle ? Comme le fait d'être un professeur... ?

Pas tellement. Beaucoup de ce qui est dit dans le roman est sorti de mon imagination. Il n'y a que la trame générale du livre qui est d'une certaine manière autobiographique. Mon père avait Alzheimer, j'ai grandi dans certains lieux évoqués dans le roman, je suis allé à l'université de Chicago... Mais les 95% de l'intrigue ne se sont jamais passés. En même temps, cette tension émotionnelle réelle est intéressante car nous pouvons la ressentir vraiment. Et je ne pense pas que j'aurai pu écrire si je n'avais pas eu l'expérience que j'ai eue... Pourtant, il n'y a pas eu de Serguei, de Bethany... Je n'ai jamais lancé de balle à travers une fenêtre, ou abandonné mon père en l'envoyant à l'hôpital... C'est aussi pour ça que le livre est différent d'un récit autobiographique, que le roman est une forme qui m'intéresse. Il y a de la place pour la créativité, et c'est super. Je n'aurai pas voulu écrire un livre avec cette thématique qui ne soit pas une fiction, car j'avais bien plus que ma seule expérience à disposition en écrivant un roman de fiction, je pouvais faire bien plus de commentaires sur la vie contemporaine que si j'avais écrit une autobiographie...

3- Cela vous a pris environ dix ans pour écrire ce livre (un chef d’œuvre pour certains)... Mais comme il s'agissait d'un premier roman, vous attendiez-vous à ce qu'il rencontre un tel succès ?

En fait, j'ai simplement essayé de finir d'écrire le livre. J'étais tellement absorbé par mon travail, à écouter mes personnages, à les suivre, et ce en gardant les yeux sur un contexte plus large car en écrivant des scènes individuelles, je gardais à l'idée de comment ces scènes s'intégraient à l'ensemble du récit. C'était facile de ne pas penser au résultat et à comment le livre serait reçu car je savais dès le départ que je m'étais engagé dans un projet de longue haleine et la simple idée de le finir aurait été tellement extraordinaire pour moi, car je savais que c'était un travail qui prendrait du temps... que je n'ai pas vraiment pensé plus loin que le soulagement que cela serait de finir d'écrire.  
Je n'ai jamais prévu pendant que j'écrivais ce qui pourrait se passer à la sortie du livre car j'étais surtout préoccupé par des questions d'écriture, de composition... Il est facile de se retrouver absorbé devant l'importance d'un projet au point de ne pas se demander comment l'ouvrage une fois fini sera reçu par les autres.  

4- Les droits pour une adaptation cinématographique ont déjà été acquis. Avez-vous une idée de comment vous voulez que le film soit ?

Hmm... j'ai effectivement des idées, mais j'espère qu'ils ne m'écouteront pas. Car j'ai un domaine de « compétence » et la capacité de faire des films n'en fait pas partie. Ce que je souhaite vraiment, c'est que le film soit un projet « indépendant », qu'il existe par lui-même car nous vivons une période où les réalisations de films sont extraordinaires... Je suis curieux de voir ce qu'un scénariste et réalisateur vont faire avec ce projet d'adaptation, sans que je n'intervienne. J'ai essayé de donner la ligne à suivre dans le roman et je veux pouvoir m'éloigner un peu de la création de cette « nouvelle œuvre ».

5- Savez-vous quel sera votre prochain projet ?


Je travaille déjà dessus... sur mon prochain roman. Cela devrait me prendre moins de temps que le premier livre. Moins de cinq ans je pense. J'espère avoir fini au cours des trois prochaines années. C'est un autre drame familial même s'il sera bien différent du premier. Il n'aura absolument rien d'autobiographique. Cela sera toujours une histoire contemporaine... Encore une fois, j'espère pouvoir écrire sur des personnages différents les uns des autres, et décrire encore le monde contemporain. L'histoire devrait se dérouler sur une période moins longue que celle de « Nous ne sommes pas nous-mêmes ».

6- La première partie du livre nous raconte l'histoire d'une famille irlando-américaine et aborde donc le sujet de l'immigration et de la difficulté de s'intégrer dans un nouveau pays. Qu'est ce qui vous a fait choisir ce type de famille et de sujet ?

Eh bien... déjà, parce que je viens d'une famille d'origine irlandaise. Mais la raison pour laquelle j'ai choisi de parler d'immigration, c'est que je pense qu'aux États-Unis et dans le monde en général, l'immigration est une ressource vitale pour un pays, elle apporte une nouvelle énergie à un endroit. Les gens immigrent pour une raison, ils arrivent avec des rêves et des espoirs... Et nous vivons dans une époque où les idées nationalistes, de fermeture des frontières (au sens propre comme au sens figuré) transforment l'immigration en un processus bien plus controversé que cela ne l'était par le passé. Il me semble avoir pensé en écrivant au sujet de l'immigration dans la période concernée, j'ai aussi écrit à propos de réflexes de notre temps... Car il y a des choses que nous perdons dès lors que nous pensons en termes de population fixée en un lieu de manière permanente.
Je ne pense pas que j'aurai pu écrire de manière aussi effective au sujet de l'histoire américaine si je n'avais pas pu décrire comment l'immigration influence la vie d'Eileen. Elle a beaucoup d'ambitions, ce qui n'aurait peut être pas été le cas si sa famille avait été aux États-Unis depuis plusieurs générations. C'est probablement ce qui m'a permis d'aborder de manière directe cette catégorie de gens qui cherchent toujours à avoir une vie meilleure que celle qu'ils ont (à grimper les échelons).

7- Ed, à contrario d'Eileen, ne semble pas rechercher autre chose qu'un bonheur domestique simple...

L'une des choses qu'il veut vraiment, c'est de pouvoir instruire ces gens qui ne recevraient pas une éducation aussi bonne s'il n'était leur professeur. Je pense qu'il comprend que les individus et les institutions ont parfois des aspirations différentes. Nous retrouvons un peu la thématique dans la série « The Wire » où les individus peuvent être plus efficaces que les institutions dans la réalisation de buts ayant des conséquences positives.
Ed comprend que s'il devenait un des administrateurs tel que cela lui est proposé, il toucherait moins de personnes qu'il ne le peut en tant que professeur. Quand bien même Eileen rêve que son fils devienne sénateur ou même président, Ed, lui, pense que son style de vie a une importance différente que les aspirations de son épouse, mais cela ne veut pas pour autant dire que c'est moins ambitieux. Il n'est pas facile d'être un professeur efficace... Il ne pense pas que les choses s'apprécient uniquement de manière quantifiable (combien d'argent cela peut générer, combien de personnes sont affectées... ?) C'est important pour lui que ses élèves fassent l'expérience d'une « vraie » éducation pendant les deux années où il est leur professeur. Il a donc des rêves radicalement différents de ceux d'Eileen ou de la plupart des gens en général.  
8- Le nom du fils vient d'un auteur (Evan Connell)... Est-ce que ses romans vous ont inspiré pour écrire votre livre ?

Le roman « Madame Bridge », oui. Au niveau de la forme, les chapitres de ce roman-là sont courts et rédigés de manière efficaces pour raconter l'histoire de toute la vie d'un personnage. Peu de romans ont ce genre de structure et « Madame Bridge » est le meilleur exemple que j'ai trouvé d'un écrivain qui décide de conter la vie de quelqu'un dans son entier tout en narrant l'histoire d'un lieu et d'une période historique. C'était un auteur très habile pour faire avancer l'intrigue avec des sauts entre les périodes du récit.... Et j'ai essayé de m'inspirer de sa technique.
De plus, il ne parle pas des événements historiques majeurs dans ce livre. Il les laisse en dehors du récit, ce qui permet de suggérer au lecteur que la vie des personnages qu'il suit est toute aussi importante que les événements historiques... J'ai trouvé cette approche intéressante et en ai tiré des leçons. Ainsi dans mon livre, je ne parle par de l'assassinat de Kennedy, car j'ai pensé que cela prendrait trop d'importance par rapport à l'intrigue de mon livre. Nous pouvons parfaitement imaginer quelle a pu être la réaction d'Eileen, mais cette omission était pour moi nécessaire afin de pouvoir concentrer l'attention du lecteur sur ses « tranches de vie » à elle.    

9- Les titres des parties sont inspirés de diverses œuvres. Pourquoi et comment les avez-vous choisis ?

Pour moi, chacun de ces titres suggérait le contenu de la partie qu'il précédait, pas dans sa totalité mais dans sa généralité. Dans un roman long comme celui-ci, il y a comme une structure « symphonique » avec des crescendos et decrescendos. Chaque partie fonctionne de manière semi-indépendante, comme des mini-romans. Même si chaque partie ne peut pas être lue de manière totalement indépendante, chacune a sa « propre vie intérieure ». Ainsi, une des parties est centrée sur une journée en particulier que je voulais faire ressortir, une autre parle du mariage et de ses difficultés, une autre encore est sur la dégénérescence d'un esprit et la perte de contrôle que cela occasionne  

10- Vous avez été sélectionné pour le prix Flaherty-Dunnan du premier roman et présélectionné pour le prix du Guardian pour un premier livre... Qu'avez-vous pensé à ce moment-là ?

J'ai été vraiment très honoré. D'avoir été sélectionné pour le prix Flaherty-Dunnan a été un réel plaisir car les romans qui figuraient sur la liste étaient extraordinaires. J'en ai lu certains et j'ai rencontré tous leurs auteurs lors de l'événement. De même pour la présélection par le Guardian. Un véritable honneur d'avoir figuré sur ces listes

Encore merci pour cette rencontre, j'aurai plaisir à vous retrouver avec d'autres questions quand vous reviendrez pour votre prochain roman.

Rencontre avec Matthew Thomas - Paris, le 12 janvier 2015 Wp_20112

Matthew Thomas a, le même jour, été l'invité de Kathleen Evin dans son émission "L'humeur vagabonde" pour son roman. Vous pouvez retrouver l'entretien ici : http://www.franceinter.fr/emission-lhumeur-vagabonde-lecrivain-americain-matthew-thomas

L'article auquel il est fait référence dans la question 1 n'est disponible qu'en anglais (traduction à venir): http://time.com/author/matthew-thomas/

Et la fiche de présentation du roman est ici: http://www.auboudoirecarlate.com/t10202-thomas-matthew-nous-ne-sommes-pas-nous-memes
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