Mon avis : « Il souffrait dans son corps, elle pourrissait dans son cœur.
Ils étaient presque quittes. Presque... »
Dernière page de tournée et juste Whaouah ! Quelle claque ! Merci madame Jomain pour cet extraordinaire moment de lecture. J'avais beaucoup aimé
Cherche jeune femme avisée, sa fraîcheur, sa légèreté, son ton plein d'humour, mais je dois avouer ça n'allait pas au-delà. Avec ce second volet, nous passons très clairement à un niveau supérieur (voire plusieurs...). C'est un immense coup de cœur pour ce roman poignant, saisissant, déchirant parfois, délicieusement sensuel, tellement beau et tellement bon... Et dire qu'il va falloir attendre plusieurs mois pour le suivant (je ne suis que désespoir...).
Grâce à Gabi et Adrien, Jane et Martin s'étaient trouvés et avaient débuté une liaison torride tournée toute entière autour de plaisirs immédiats et intenses. Jusqu'au jour où le drame est survenu : en conduisant beaucoup trop vite, malgré les mises en garde de Martin, Jane cause un accident de voiture. Gravement blessé, Martin est amputé d'une jambe tandis que Jane est intacte.
Trois ans plus tard, c'est un Martin très différent que nous découvrons, un Martin qui a repris sa vie en main malgré le traumatisme de l'accident et qui essaye de se reconstruire au jour le jour. Depuis ce jour funeste, il n'a plus revu Jane, a refusé de l'écouter et a jeté toutes les lettres qu'elle lui a envoyé durant deux ans. Et voilà que Gabi lui annonce que Jane est de retour à Paris pour affaire et qu'elle sera même présente à l'anniversaire de Paul et Sophie. Toute sa colère, toute sa haine, toute sa rancoeur remontent à la surface. En revoyant Jane, il lui fait bien comprendre qu'il ne lui pardonnera jamais, qu'il lui souhaite de souffrir comme il a souffert et qu'il adorerait se venger. Et quand Gabi lui avoue à quel point Jane souffre et qu'elle se croit même de façon ridicule amoureuse de lui, Martin pense tenir là sa vengeance. Il fait à Jane la plus incroyable des propositions, une proposition scandaleuse, douloureuse... Et contre toute attente, Jane accepte en rajoutant juste des conditions. C'est donc d'un commun accord qu'ils entament cette nouvelle relation...
« Bon sang, que lui était-il passé par l’esprit de lui faire cette proposition ? Ah ! Il ne le savait que trop bien. Ce soir, il ne s’était pas attendu à une pareille plaidoirie quand elle lui avait expliqué combien elle regrettait ses actes et à quel point sa vie était devenue un enfer. Ça l’avait rendu dingue. Dingue qu’elle puisse imaginer que ce serait facile de le faire flancher. Puis elle lui avait frôlé la joue, et une vague de désir s’était emparée de lui. Il en avait ressenti une telle colère qu’il avait voulu se détourner, mais la manière dont Jane le regardait l’en avait empêché. C’est à cet instant précis qu’un scénario de vengeance s’était imposé à lui. Il s’était senti pousser des ailes. Il avait les moyens de l’écraser, de la briser. La rabaisser, l’humilier, la blesser, lui faire perdre tout espoir. Et cette idiote lui avait tenu tête en relevant ce putain de défi. Nom d’un chien ! Il s’était conduit comme un salaud. Qu’elle l’aime ou pas, Jane avait sûrement conscience qu’elle souffrirait, qu’il ne l’épargnerait pas, alors pourquoi ? Pourquoi avait-elle accepté ce deal abject ? »
J'avais été plus que surprise en découvrant que Jane et Martin seraient les héros du second tome. Ils ne m'avaient pas parus particulièrement sympathiques et c'est le moins qu'on puisse dire, tous deux aussi manipulateurs et égoïstes dans leurs rapports à Gabi et Adrien. Et pourtant, là, dès les premières pages, on s'attache profondément à eux, dans une espèce d'empathie profonde créée par les mots même de l'auteur. Ils changent tous deux de façon spectaculaire sans que cela ne nous choque. Vu le contexte et la manière dont c'est amené, c'est parfaitement crédible et compréhensible.
Martin, sobre depuis l'accident, est passé de « voleur archéologue déchu » à web-designer talentueux. Il a remboursé toutes ses dettes et a même pu ouvrir une nouvelle boite florissante. Désormais, sa vie ne se résume qu'à deux choses : le travail et le sport. Malgré les longs mois passés et son corps parfaitement dessiné, il n'a toujours pas accepté son nouveau corps avec son membre manquant. Et comme pour marquer dans sa chair cette douleur et ce manque, il s'est fait tatoué des motifs tribaux sur toute une partie du corps, du genou à l'épaule. La colère et la haine l'étouffent de l'intérieur et il ne sait comment les exprimer, jusqu'à ce que Jane réapparaisse... Il se comporte donc de manière odieuse, mais on le comprend et malgré tout, dès le début, on l'aime.
Jane a également beaucoup changé. Hanté par la culpabilité et la tristesse, elle a appris à se centrer moins sur elle-même et à s'ouvrir aux autres. Ce n'est plus la Jane froidement sophistiquée qui débarque à Paris, mais une Jane avec des kilos en plus, des cheveux roux naturellement bouclés, des tâches de rousseur apparentes et un maquillage relativement discret. Comme Martin, elle n'a connu personne depuis trois ans et s'est complètement immergée dans le travail.
Comme pour le premier volet, Sophie Jomain revisite ici à sa manière un conte, celui du petit soldat de plomb et sa danseuse, et les références en sont nombreuses tout au long du récit, parfaitement amenées.
Une fois qu'on a pris la mesure des transformations qui se sont opérées en eux, on pénètre complètement dans leur univers. Dès le prologue et les premiers chapitres, nous sommes scotchés, abasourdis par ce qu'on découvre et par la manière dont les choses évoluent et le roman devient un page-turner pour savoir au plus vite comment les choses vont évoluer. Et c'est remarquablement écrit. On adore tout, le nouveau ton employé, la profondeur des sentiments, des sensations, les caractères des protagonistes, la manière dont ils cherchent à se faire du mal tout en se faisant du bien. Ne serait-ce que la scène où ils se revoient la première fois. On ressent tellement fortement leurs émotions qu'on a le cœur battant et les mains moites. Et que dire des scènes de sexe, si ce n'est qu'elles sont sublimes. On ressent tout avec acuité et on a mal pour eux de ne pas parvenir à communiquer. Quant à la première vraie scène d'amour, celle où Jane découvre enfin Martin dans son intégralité, Dieu qu'elle est magnifique... Et la dernière scène... Pfff magique !
Pour notre plus grand plaisir également, Gabi et Adrien sont extrêmement présents. On fait aussi davantage connaissance avec Antoine de St-Armand, le médecin de la clinique St Roch. Jane et lui vont nouer une forte amitié et on découvre peu à peu pourquoi ce brillant médecin de 39 ans est encore célibataire et si bourreau de travail. Annabelle, la femme de son collègue et ami, le docteur Berckin, n'en est pas étrangère. Shut ! Ne jugez pas avant de connaître la situation... Quoi qu'il en soit, ils seront les héros du prochain opus et leur histoire commence déjà véritablement ici. Vivement !
Une parfaite réussite donc. Un roman profond où les émotions affleurent à chaque phrase, une leçon sur le courage, la rédemption et l’amour. C’est beau, touchant, remarquablement écrit et on en redemande. Sophie Jomain n’a plus rien à envier aux grandes romancières américaines…
Un dernier mot sur l'excellent travail de Miesis sur la couverture : elle est aussi bien magnifique qu'en parfaite adéquation avec l'histoire. Bravo !